Pour "entendre parler", il
faut aller au: 10e. Congrès
de la Ligue savoisienne
5 et 6 novembre 2005 à Doussard (province du Genevois)
C'est au cours de l'année 1995 que la Ligue savoisienne a tenu ses premières
conférences publiques et réuni ses premiers adhérents. Son premier Congrès réunit un
millier de participants à Albertville le 26 mai 1996. Dès le début, les détracteurs ne
manquèrent pas pour annoncer la disparition prochaine de la Ligue et de l'idée même
d'émancipation de la Savoie. Pourtant, la Ligue est toujours là et réunit des forces
toujours plus qualifiées et plus déterminées. Ne manquez pas le dixième Congrès
(ouvert au public: conférences, débats, banquet, animations).
Après la publication, dans notre n°7, de l'article "L'affaire des zones franches
de Savoie monte en cassation", plusieurs lecteurs nous ont demandé comment ils
pourraient se procurer le texte de l'arrêt du 7 juin 1932 de la Cour Permanente de
Justice Internationale, qui régit encore aujourd'hui le régime des zones.
C'est très simple: la Cour Internationale de Justice, qui a remplacé la CPJI en 1946
et siège à la Haye comme elle, est gardienne des archives de la Cour à laquelle elle a
succédé. Tous les actes officiels de la CPJI sont accessibles par internet sur le site
de la CIJ. Il suffit donc d'entrer sur le site:
www.icj-cij.org
et de cliquer, en bas et à droite de la page d'accueil, sur l'entrée:
Publications de la Cour permanente de Justice internationale (1922-1946)
L'arrêt de 1932 se trouve dans la série A/B au numéro 46. Le document pèse 8,3 Mo et
se télécharge en une minute si vous avez une connexion ADSL. Vous pouvez alors le lire
en français et en anglais, les deux textes étant présentés en vis-à-vis. Il est
précisé qu'en cas d'incertitude le texte français fait foi.
D'autres documents sont proposés dans la série A au numéro 22.
Avis aux juristes et amateurs de droit international.
Le Savoisien (n°3, puis n°6) avait donné quelques informations sur un projet qui
faisait débat dans la province canadienne de l'Ontario ainsi de dans la province voisine
du Québec: la mise en place de tribunaux musulmans habilités à juger les litiges
familiaux selon la loi de l'islam.
Ce débat est désormais clos. En effet le Premier Ministre de l'Ontario, Dalton Mac
Guinty, a tranché, déclarant le 11 septembre dernier: "J'en suis venu à la
conclusion que le débat a assez duré. Il n'y aura pas de charia en Ontario".
Du coup, les tribunaux d'arbitrage pour les catholiques et les juifs, habilités par la
loi depuis 1991, cesseront d'exister. Le Premier Ministre a conclu: "Il n'y aura pas
d'arbitrage religieux en Ontario. Il y aura une loi pour tous les Ontariens".
(Suite du récit tiré de la biographie de Joseph de Maistre par François Vermale,
parue en 1927 dans les Mémoires et Documents de la Société Savoisienne d'Histoire et
d'Archéologie.)
Résumé de l'épisode précédent:
Réfugié à Turin, Joseph de Maistre, toujours soupçonné de jacobinisme, ne parvient
pas à obtenir un poste au service du Roi. Fin 1798, les Français annexent le Piémont;
il fuit à Venise. Après un séjour en Toscane, il est nommé chef de la Justice royale
en Sardaigne, où il exerce sa charge avec probité de 1800 à 1803. Le nouveau roi
Victor-Emmanuel 1er, abandonné par presque toute sa Cour, nomme Joseph de Maistre en
mission à Petersbourg. Il se met en chemin et séjourne à Naples, puis à Rome
illustration: (reprise de Écho de Savoie n°75): Chambéry, statues de Joseph et Xavier
de Maistre.
Livre V: J. de Maistre en Russie
(1803-1817).
Chapitre I: La leçon au Tzar.
Sous l'ancien régime, le titre d'ambassadeur ou d'envoyé extraordinaire était
toujours lié à l'idée de faste, d'apparat, de luxe. J. de Maistre partant pour la
Russie n'avait aucune de ces apparences d'autrefois. Son Roi, auquel la Révolution
triomphante n'avait laissé la possession que de la petite île de Sardaigne, était un
roi presque sans couronne et sans revenus. Dans cette détresse, le plus clair des revenus
de Victor-Emmanuel Ier consistait dans l'argent qui parvenait de Londres et surtout de
Saint-Petersbourg. Si J. de Maistre était envoyé en Russie, ce n'était pas pour faire
de la grande politique, mais pour tâcher de soutirer au Trésor russe quelque argent.
Subsidiairement, il devait assurer l'intervention du Tzar afin qu'une compensation sur le
continent fût accordée au roi de Sardaigne, pour la perte de ses provinces du Piémont.
Victor-Emmanuel se serait fort accommodé du territoire de la république de Gênes. Mais
il fallait d'abord vivre. Le principal dans cette mission était d'obtenir la continuation
du subside moscovite.
Le chargé de mission extraordinaire (il n'avait pas le titre d'ambassadeur) se mit donc
modestement en route. Il partit sans secrétaire, rien qu'avec un domestique. Le Roi lui
avait donné une de ses voitures. J. de Maistre s'était habillé à ses frais. Tandis
qu'il servirait en Russie, Victor-Emmanuel s'était engagé à assurer une pension à Mme.
de Maistre qui, avec ses enfants, résiderait soit à Turin, soit en Savoie. Quant à lui,
il devait vivre d'abord avec les 5303 livres de son bien qu'il emportait avec lui. Le 10
mars 1803, J. de Maistre écrivait à sa fille Adèle: "Le Roi est dans des
circonstances bien difficiles; mais il fait pour moi et ma famille tout ce qu'il peut
faire: ainsi nous n'avons qu'à remercier et attendre en paix l'avenir. Je me garde bien
de te dire que je suis content ou du moins heureux,, malgré ma destination si brillante.
Pour être heureux, il faudrait que ma famille fût autour de moi; mais c'est
précisément cette tendresse qui me donne des forces pour m'éloigner de vous. C'est pour
vous que je ma passe de vous".
Parti le 20 avril 1803 de Rome où Victor-Emmanuel résidait, J. de Maistre arriva,
après s'être arrêté à Vienne, le 1er. mai à Saint-Petersbourg. Il lui restait 5134
livres en poche. Le 5, il avait sa première audience avec le comte Woronzow, chancelier
de l'Empire; le 9, avec le prince Czartoriski, adjoint au chancelier. Le 14, il était
présenté à l'Empereur et à l'Impératrice. Le 17, à S.M. l'Impératrice-mère et aux
deux archiduchesses. Enorgueilli, J. de Maistre marquait sur ses Carnets: "En moins
de trois mois, j'ai été présenté au Pape, à l'Empereur d'Allemagne et à l'Empereur
de Russie. C'est beaucoup pour un Allobroge, qui devait mourir attaché à son rocher
comme une huître".
Le 26 juin 1803, J. de Maistre assiste pour la première fois à un dîner diplomatique.
Ce fut chez le comte de Stedding, ambassadeur de Suède, avec qui "il eut une
conversation très intéressante sur les affaires du roi et sur sa propre position".
La Suède, par son roi, était le champion le plus fidèle de la cause des monarques
dépossédés. Le lendemain, il revoyait le prince Czartoriski qui, le 4 août, l'appelait
en audience particulière dans laquelle, pour la première fois, il dit "des choses
très flatteuses sur le compte de S.M. le Roi de Sardaigne et sur celui de son Envoyé
extraordinaire".
Ces premiers mois de Petersbourg, J. de Maistre les passa dans la compagnie de son
frère Xavier. Celui-ci avait eu des aventures extraordinaires. Envoyé en mission par
l'état-major sarde près l'armée du général Souvaroff, il avait suivi la dite armée
retournant en Russie, et ce, sans l'autorisation de son Roi. Sur quoi il fut traité de
déserteur dans l'entourage du roi de Sardaigne. Après la disgrâce de Souvaroff, Xavier
s'était trouvé sans emploi et sans ressource; alors il s'était mis à peindre des
portraits à l'huile. Il n'avait pas tardé à devenir un peintre à la mode. Depuis, il
vivait à Moscou, sous la protection de la princesse Anna-Petrowna Schakowskoï, gagnant
une moyenne de 5 louis par jour, et menant grand train.
***
Dès le mois de décembre 1803, J. de Maistre intervenait auprès de M. le comte de
Goltz, ambassadeur de Prusse à Saint-Petersbourg, afin d'obtenir un subside de Berlin
pour Victor-Emmanuel. Dans ce même mois, il entrait en conversation diplomatique avec
l'ambassadeur d'Angleterre. Il était, de plus, reçu officiellement par l'Empereur et
l'Impératrice de Russie.
Très rapidement donc, J. de Maistre s'était, comme nous dirions aujourd'hui,
débrouillé. Il avait été aidé beaucoup à ce point de vue par le duc de Serra
Capriola, ambassadeur des Bourbons de Naples en Russie, lequel avait, par son mariage avec
une princesse russe, une grosse situation à Petersbourg. Mais cela n'aurait pas suffi.
Appliquant une méthode qu'il avait déjà employée à Lausanne où il était devenu
intime avec M. de Trevor, l'ambassadeur anglais à Turin, comme avec M. Wickam,
l'ambassadeur anglais à Berne, il n'eut à Petersbourg de cesse avant qu'il ne soit
rentré dans l'intimité de l'ambassadeur anglais. En juillet 1804, nous trouvons J. de
Maistre installé à la campagne chez sir Waren, qui avait un domaine sur la route de
Cronstadt.
Comment J. de Maistre était-il arrivé à un tel résultat? Il ne l'avait pu ni par le
faste, ni par la religion, ni par les bons dîners, étant donnée l'impossibilité
absolue où il était de ne vivre autrement qu'en pratiquant la plus stricte économie.
Fin psychologue, J. de Maistre, qui pratiquait cette galanterie dont pouvait se targuer
"tout homme comme il faut qui avait appris le français il y avait plus de vingt
ans", démêla que le véritable ambassadeur n'était pas cet amiral anglais, mais sa
femme. Il démêla encore que Milady, comme il l'appelait, avait une âme froissée et
dolente, qu'elle n'était pas heureuse. Il ne tarda pas à se poser en sigisbée.
Lorsqu'en août 1804 sir Waren fut rappelé à Londres, J. de Maistre écrira: "Son
départ est une très grande perte pour moi. C'est une excellente maison qui m'était
ouverte et qui se ferme pour moi. Ses bons offices, son amitié et celle de Milady m'ont
été ici fort utiles d'une manière indirecte, car tout se tient dans le monde. C'est à
cette dame, par exemple, que je dois la connaissance du Ministre de la Marine, M. l'amiral
Tchitchagof... Milady en partant me fait héritier de ses livres. Je la regrette plus que
je ne puis vous le dire. Elle a 42 ans".
Chez l'ambassadeur anglais, en effet, fréquentait de façon suivie l'amiral
Tchitchagof, familier du Tzar et fils d'un amiral russe célèbre au temps de Catherine
II. Tchitchagof avait été élevé en Angleterre et avait épousé la fille d'un amiral
anglais. Quand le couple Waren se fut éloigné de Petersbourg, c'est sur la maison
Tchitchagof que J. de Maistre dirigea son emprise. De Mme. Tchitchagof il écrira:
"Elle a de l'esprit, du sens, de l'instruction, de la morale surtout et c'est une
excellente épouse comme toutes les Anglaises, quand elles s'en mêlent". Comme
Tchitchagof aimait sa femme éperdument, J. de Maistre confesse qu'il lui a fait sa cour
avec assez d'assiduité. Il réussit au point "d'y souper tous les dimanches. C'est
le jour de la Bible, où les Anglaises ne reçoivent pas les parents ni les amis".
"Souvent, rapporte-t-il, je me suis trouvé en tête-à-tête lorsque le ministre est
absent. Elle a l'air d'une colombe et je ne connais rien de si fin et de si décidé et de
si difficile à saisir".
Quoi qu'il en soit, J. de Maistre avait raison d'écrire, dès avril 1804: "J'ai
quelques bons amis". Aussi fit-il savoir à Rome que Victor-Emmanuel était trop
éloigné de ce milieu russe pour lui donner des directives. Il revendiquait pour lui
toutes les responsabilités de la politique qu'il pratiquait: "Un chasseur qui
écrirait chez lui pour savoir s'il faut tirer le gibier qui passe à tire d'aile serait
moins risible que moi si j'attendais, pour présenter mes notes, des instructions de Rome
ou de Londres".
***
Quand J. de Maistre arriva en Russie, il avait 50 ans. Alexandre Ier n'en avait que 26.
Ce jeune Tzar, d'allure simple et d'abord affable, arrêta un jour J. de Maistre dans la
rue, pour lui demander de ses nouvelles et le complimenter sur son acclimatation rapide.
À ce geste il est facile de juger du goût démocratique de cet autocrate, qui affectait
d'ailleurs de poser au républicain plutôt qu'à l'Empereur, et dont l'ambition secrète
était, à certains jours, de ressembler à un Président de la République des
États-Unis. Cette mentalité républicaine, il la devait au colonel suisse La Harpe, qui
avait été son précepteur. Si, plus tard, Alexandre accentua ses tendances au soupçon
et à la fourberie, au début de son règne il donnait l'impression d'être confiant.
C'était une séduction de plus ajoutée aux qualités de séduction naturelle qu'il avait
en lui. Il était beau physiquement, et sa jeunesse conquérait les curs. L'
"Ange du Nord", comme on a appelé Alexandre, séduisit littéralement J. de
Maistre et dissipa ses appréhensions premières à l'égard de cet Empereur qui devait sa
couronne à un crime de palais, presque à un parricide.
En Russie, J. de Maistre avait été précédé par la réputation d'écrivain politique
qu'il avait acquise depuis le succès des "Considérations sur la France". Le
premier, du côté des émigrés, il avait oser montrer la force de la Révolution, et
cependant affirmer que cette force ne construirait rien de stable. La Révolution serait
un jour vaincue, mais quand? Les victoires de Souvaroff avaient jeté sur les armées
russes un lustre considérable. Grâce à elles, pour la première fois, les généraux
français avaient connu la défaite et la nécessité de reculer. La force russe était
une force immense, c'est elle qui devait fatalement l'emporter. J. de Maistre, en 1803, ne
doutait pas de sa victoire. Il fit crédit à la jeunesse du Tzar et de ses jeunes
conseillers. Avec eux, il se déclara Européen, se grisa d'optimisme et travailla au plan
"secretissime" de reconstruction de l'Europe élaboré par le prince
Czartoriski, chancelier secret de l'Empire. Il ne tarda pas d'ailleurs à s'apercevoir que
le cabinet noir de la chancellerie russe était particulièrement friand de la lecture de
lettres qu'il adressait soit au roi de Sardaigne, soit au chevalier Rossi, son secrétaire
d'État. J. de Maistre ne changea pas son "chiffre" qu'il savait connu. Il
trouva que c'était une voie commode de faire parvenir ses conseils approbatifs ou
critiques jusqu'à son grand ami Alexandre. De cette méthode, il en usera de façon
constante au cours des années difficiles, de 1805 à 1814. (...)
***
Pour le ministre de Sardaigne, les Bourbons de France ne sont pas capables de rétablir
eux-mêmes leur puissance. Ils n'ont pas la main assez ferme et assez dure pour exécuter
cet ouvrage. Ce sera l'uvre d'un usurpateur de génie: "Laissez faire
Napoléon, laissez-le frapper les Français avec une verge de fer, laissez-le emprisonner,
fusiller, déporter tout ce qui lui fait ombrage". Laissez-le rétablir la noblesse,
détruire la République, détruire l'égalité. Ce faisant, il travaille pour le retour
des Bourbons. Ce sera sa mission. a conclusion est très ferme: Bonaparte n'est qu'un
champignon impérial, il ne peut durer, et J. de Maistre le démontre en se basant sur les
données d'une politique qu'il appelle "expérimentale", parce qu'elle est
basée sur l'étude de l'histoire. Il n'y a pas, en effet, d'exemple historique qu'un
simple particulier, monté au rang suprême, ait commencé une dynastie royale.
Charlemagne était Pépin; Hugues Capet, qui remplaça les Carolingiens, était duc de
Paris. Les Stuart furent renversés par un prince. Cromwell, qui était dans le cas de
Napoléon, n'a pas fondé une race. Il en sera de même de Bonaparte. C'était là des
vues originales et nouvelles. J. de Maistre croyait que le monde politique et social
était régi par des lois comme le monde physique. Cette conception, Auguste Comte devait
la vulgariser au 19e. siècle.
La proclamation de l'Empire français est donc pour J. de Maistre un événement
capital. Elle marque l'arrêt de la Révolution, c'est-à-dire de l'esprit de révolte
contre les souverains. Mais l'Empire, ce n'est pas la paix. Ce pourrait bien être, au
contraire, le commencement de "l'Ère de Tamerlan", c'est-à-dire le
déchaînement de l'esprit de conquête. L'ordre des souverainetés européennes risque
d'être bouleversé encore davantage. Le problème pour la Russie reste le même. Si elle
veut rétablir l'équilibre européen, elle doit se préparer à la guerre.
***
Les conseils de J. de Maistre eurent un grand succès dans l'entourage d'Alexandre Ier.
Dès la fin de l'année 1804, il fréquente chez deux des triumvirs, le comte Kotchubey et
le comte Strogonof; de plus, il est lié intimement avec l'amiral Tchitchagof, ministre de
la marine. "Toutes ces connaissances, comme il l'écrivait, sont fort essentielles,
parce qu'en leur parlant, c'est comme si je parlais plus haut". La faveur dont jouit
J. de Maistre fut rapidement si marquée, qu'il ne tarda pas à être admis dans le secret
du Tzar parmi les diplomates employés de façon occulte. Le 11 janvier 1805, J. de
Maistre l'avoue par une des notes de ses Carnets: "Mon Mémoire politique sur
l'Italie, la maison d'Autriche, celle de Savoie, etc., a été communiqué par une main
amie, hors la voie officielle"; J. de Maistre en tire quelque vanité; aussi
note-t-il: "Janvier 1805. Époque remarquable de ma vie".
Le Tzar remercia J. de Maistre de sa collaboration secrète, en nommant Xavier de
Maistre au grade de lieutenant-colonel dans l'armée russe, avec le poste de directeur de
tous les établissements scientifiques dépendant de l'amirauté russe. Pour lui prouver
encore sa satisfaction, il accorda des gratifications aux officiers piémontais entrés au
service de la Russie.
***
Dans le Mémoire sur l'Italie, l'Autriche, etc., que J. de Maistre venait de
communiquer, il démontrait que la guerre contre la France s'imposait au nom de
l'équilibre européen. Mais cette guerre ne devait avoir qu'un but: contraindre la France
à rentrer dans ses anciennes limites territoriales. L'erreur des précédentes coalitions
européennes contre la Révolution avait été d'avoir voulu démembrer la France. Or
cette nation, comme toute sles nations chrétiennes, a droit à l'existence; vouloir la
détruire est contraire à l'ordre européen, c'est-à-dire chrétien. Les nouveaux
coalisés devront prendre comme exemple Guillaume d'Orange dans sa lutte contre Louis XIV,
et subir la direction de la Russie. Seul cet Empire est assez désintéressé pour
reconstruire l'Europe. L'Autriche est trop perfide, trop égoïste, trop avide
d'agrandissements pour assumer la direction de la coalition nouvelle. Elle n'a cessé
depuis 1792 de trahir l'Europe. La Russie, comme elle l'avait démontré déjà avec Paul
Ier et Souvaroff, était seule capable de vues nobles et élevées en politique.
Cette haine de l'Autriche fit particulièrement apprécier J. de Maistre par le prince
Czartoriski, le triumvir le plus influent de l'entourage d'Alexandre Ier.
Quant au rôle d'arbitre justicier entre les souverainetés européennes, le chevalier
du droit et de la paix que J. de Maistre réservait au Tzar, il était fait pour plaire à
l'imagination d'Alexandre Ier. Quand en 1814-1815 il se complut dans ce rôle avec faste,
le Tzar ne réalisait en somme qu'un rêve de jeunesse! En attendant, dans son Mémoire,
J. de Maistre savait habilement griser le jeune Alexandre à l'aide de comparaisons
historiques flatteuses.
À la veille d'Austerlitz, il n'hésitait pas à écrire: "L'excellent Alexandre
fait mouvoir 200.000 hommes, il marche lui-même au premier jour. Ses flottes contiennent
ses opérations de terre, il réunit les volontés divergentes, il se rend le Godefroy de
cette nouvelle croisade. Tout cur européen doit un hommage d'admiration, de
tendresse et de reconnaissance à ce jeune souverain, l'exemple et le défenseur de tous
les autres".
***
La première rencontre sur un champ de bataille entre Napoléon et Alexandre fut pour ce
dernier un désastre: ce fut Austerlitz. Le Godefroy de Bouillon de cette nouvelle
croisade y perdit tout prestige militaire. Le jour d'Austerlitz, Alexandre et son
entourage, trompés par un succès d'avant-garde qu'ils avaient obtenu la veille, crurent
que Napoléon était dans une situation aventurée. Contrairement à l'avis du maréchal
Koutousoff, lequel conseillait d'attendre l'arrivée de renforts avant d'engager l'action,
les Russes livrèrent combat en suivant les directives du chef d'état-major de l'armée
autrichienne. Les soldats russes, qui n'avaient pas mangé depuis quarante-huit heures, se
firent massacrer inutilement. Quant à Alexandre, qui commandait en personne, il fut pris
de panique. C'était la première fois qu'il assistait à une vraie bataille. Jusque là
il s'était abruti, comme tout prince allemand qui se respecte, à faire manuvrer
des régiments et à passer, ce qui horripilait J. de Maistre, des revues.
Il s'était cru un foudre de guerre parce qu'il avait remporté des victoires sur le
terrain truqué d'une manuvre d'état-major. Le jour de la bataille pour de bon, il
dut déchanter. Alors, affolé, il perdit tout son sang-froid et s'enfuit: "Mauvais
cavalier, il fut longtemps arrêté par un fossé et, quand il réussit à franchir cet
obstacle, ses forces l'abandonnèrent. Il dut mettre pied à terre, il s'affaissa au pied
d'un arbre, et se couvrant la figure avec un mouchoir, il pleura". Fait plus grave
encore: Alexandre Ier, avant de s'enfuir, avait donné l'ordre aux troupes russes de se
retirer. La retraite devint alors déroute.
Joseph de Maistre semble sortir peu à peu de l'oubli dans lequel son illustre figure
était tombée.
En 2004 est paru, aux éditions Le Félin, un "Joseph de Maistre", biographie
composée en 1960 par François Vermale (dont nous publions en extraits l'ouvrage de 1927)
et son ami Claude Boncompain (18,90).
En 2005, l'éditeur lausannois L'Âge d'Homme a publié un épais "Dossier H,
Joseph de Maistre", de 878 pages, conçu et dirigé par Philippe Barthelet
(59).
Sous-ensemble oriental de l'immense espace des Trois Vallées et fleuron de la
Tarentaise, Courchevel est une des plus prestigieuses stations de ski du monde. Son avenir
est toutefois menacé par des facteurs naturels contraignants: manque d'eau potable,
baisse de l'enneigement même à haute altitude, rareté de la ressource en eau pour
l'enneigement artificiel. Avec beaucoup d'argent, la S3V (Société des Trois Vallées,
concessionnaire des remontées mécaniques) espère consolider l'intense brassage
financier que permet la notoriété de la station.
L'eau potable manque? Qu'à cela ne tienne, la commune de Courchevel (anciennement
Saint-Bon Tarentaise, cela faisait un peu plouc...) veut ouvrir dans son PLU (Plan Local
d'Urbanisme) de nouvelles zones à la construction de chalets de luxe. Pour cela, elle a
besoin d'augmenter sa ressource en eau potable. C'est donc main dans la main avec la
municipalité que la S3V pousse à grande vitesse un projet ambitieux: pomper dans un
torrent de Bozel, la vallée non touristique adjacente, 900 mètres cubes d'eau par heure
pour les utiliser à Courchevel, aussi bien comme eau potable qu'en alimentation des
canons à neige. Pour que le système fonctionne, compte tenu de la brièveté des
périodes propices à l'enneigement artificiel, il faut un bassin de stockage
supplémentaire de 125 000 mètres cubes. Le projet comporte donc trois chantiers:
un lac collinaire de 2 hectares sur l'alpage de l'Ariondaz à Moriond (Courchevel
1650);
une conduite de 4 km de refoulement à partir d'une prise d'eau dans la vallée
de Bozel;
une conduite de 4 km pour déverser l'eau de l'Ariondaz dans le lac du Biolley,
sur Courchevel 1850.
Le document conjoint "Mairie-S3V" ne mentionne même pas que les vaches seront
expulsées de 2 hectares d'alpage: ces ruminants ne se voient pas en hiver, et leurs
bergers ont le bon goût de se cacher, en saison, dans leurs antiques fermes savoyardes à
petites fenêtres...
La présentation du projet est signée par Claude Faure, qui fut longtemps Directeur des
services du Conseil général de la Savoie, et préside depuis quelques années la S3V: un
emblème vivant de l'économie mixte...
Monsieur Faure, si pressé de réaliser son installation de pompage et de stockage
d'eau, n'indique pas pour combien d'années le système suffira aux besoins de la station.
Si l'évolution climatique et l'expansion immobilière continuent dans le même sens, il y
a de quoi être très inquiet sur l'avenir des montagnes de Savoie.
Dès l'année prochaine, il faudra s'acquitter d'une taxe pour passer certains cols du
Tyrol du Sud. C'est ce qu'a décidé le gouvernement de la province le 29 août, à
Bolzano. Le concept d'introduction des taxes aux cols a été approuvé à la demande du
Landesrat (député provincial) Florian Mussner.
Les premières routes concernées seront celles des cols du Timmelsjoch et du Stelvio.
On envisage également de faire passer à la caisse les conducteurs de voitures et de
motos qui franchiront le Stallersattel. Du côté autrichien de la route du Timmelsjoch,
au Tyrol, une taxe de 10 euros par voiture et de 8 euros par moto est déjà prélevée,
ce qui a simplifié la décision du Tyrol du Sud, précise le gouverneur de la province,
Luis Durnwalder. Une taxe commune avec l'Autriche est d'ailleurs prévue. Il en va tout
autrement au col du Stelvio qui mène à la province voisine de Lombardie. Du côté
lombard, les oppositions et les interrogations soulevées par la décision du Tyrol du Sud
sont encore nombreuses. Le Tyrol du Sud poursuit également ses négociations avec les
provinces voisines de Belluno et de Trente afin d'introduire éventuellement une taxe sur
les routes des cols des Dolomites.
Pour concrétiser le principe de cette taxe, il faut encore définir le lieu de
perception et le montant à prélever. Ces décisions doivent être discutées avec les
communes concernées. On prévoit un montant allant de 10 à 15 euros par trajet et les
motos devront probablement débourser un peu moins que les voitures.
A ce jour, une taxe classique pour les grands cols alpins n'existe qu'en Autriche. Pour
emprunter la route du Grossglockner, un automobiliste doit payer jusqu'à 26 euros. Ce
type de taxe à payer aux cols est encore largement inconnu dans les autres pays alpins.
Toutefois, il est courant à de nombreux endroits de s'acquitter d'une taxe pour passer un
tunnel.
Vincent Perez a dédicacé son livre dans une rue de
Thonon le 22 juillet
Comment réunir, dans un même roman historique, la Savoie et la Catalogne? C'est un
étonnant défi que relève avec succès Vincent Perez, comme s'il s'acquittait d'une
dette envers les deux pays qui ont inspiré le parcours de sa vie. Né à Tarragona en
Catalogne, l'auteur s'est exilé très jeune au moment de l'instauration de la dictature
franquiste. Devenu professeur, il s'installait à Thonon, où il a enseigné prendant 30
ans l'espagnol (plus exactement le castillan, car la langue catalane ne figure pas au
programme des lycées français). Époux d'une Chablaisienne, il vit aujourd'hui en
Catalogne nord, près de Perpignan.
Le personnage principal de L'Ombre du Lac est la ville de Thonon, plus précisément le
port de Rives, ses pêcheurs, et le sombre château de Montjoux dont les murailles
plongent dans les eaux alanguies du Léman. D'autres lieux prennent vie au fil de
l'action: la ville haute, Ripaille, Coudrée...
Inquiétant et mystérieux, ce château lacustre de Montjoux, au fil de l'évocation
romanesque! De pesants mystères le hantent au fil des siècles. La narration est ici à
triple fond. En surface le Thonon d'aujourd'hui, lieu de vacances pour deux étudiants de
Barcelone, un Thononais et un Catalan. Un manuscrit trouvé dans la bibliothèque du
château fait l'essentiel du récit, avec pour toile de fond Thonon en 1742-1743, sous
l'occupation espagnole. Il évoque aussi la génération précédente, la fraternité
d'armes du vieux châtelain de Montjoux avec le père de l'auteur du manuscrit, deux
nobles qui combattirent ensemble contre les Castillans pendant la guerre de succession
d'Espagne (1701-1714) jusqu'à l'effondrement de l'État catalan.
L'Ombre du lac n'accable pas le lecteur avec une érudition historique. Vincent Perez
est un romancier, il nous entraîne dans les rapports complexes qui se nouent entre ses
personnages. Le principal d'entre eux est l'auteur du manuscrit de 1743, Guilhem de
Riudebens. Il découvre l'étrange famille du comte de Lonnaz, châtelain de Montjoux: la
comtesse Anne Hélène, passionnée malheureuse, la fille muette Alix, le fils Gaëtan,
sans oublier les domestiques et le curé. Mais aussi, hors de la famille du comte, le
pêcheur Michel Dubouloz, le rival François de Montferrat, les conjurés savoisiens qui
résistent à l'occupant, le commandant de la garnison espagnole...
À travers une intrigue qui tient le lecteur en haleine jusqu'au bout, on perçoit la
sensibilité de Vincent Perez, à la fois émerveillé et mal à l'aise dans cet univers
savoisien qu'il découvre. Le paysage changeant du Léman, magnifiquement décrit, la
rudesse du climat (pluie désespérante, neige, brouillard, nuages, chaleurs accablantes,
tempêtes, bise qui transperce...) désorientent le bouillant Catalan tandis qu'il apprend
à déchiffrer les mentalités complexes des taciturnes Chablaisiens.
L'Ombre du lac est une oeuvre singulière qui saura charmer bien des lecteurs en Savoie.
Dans sa version originale en catalan, le roman a obtenu en 1990 le prix littééraire
Fiter y Rossell institué par le gouvernement d'Andorre.
Vincent Perez, "L'Ombre du lac", Cap Béar Éditions
(www.cap-bear-editions.com) 9.
Nous navons pas de centrales, mais nous en partageons quand même les risques!
Les autorités françaises citent nommément la centrale du Bugey (Ain, environ 30km à
lest de Lyon) dans une note aux parents délèves des établissements
scolaires de Savoie.
Cette note concerne lutilisation de pastilles diode en cas daccident
nucléaire dans cette centrale. Les pastilles devraient être mises à disposition des
chefs détablissements suivant le plan de distribution de la commune pour les
écoles, ou auprès des pharmacies hospitalières pour les établissements du second
degré. Si lon comprend bien la note, il semble quaucun stock ne soit
disponible directement dans les écoles, mais quil y aurait une distribution en cas
de problème.
Est jointe une "procédure" qui décrit les directives générales en cas
daccident, soit la "mise à labri", et la "prise
diode" (extraite des recommandations et posologie de la notice du médicament).
Ainsi il aura fallu 27 ans avant que les "autorités" décrivent des mesures
à prendre en cas de problème au Bugey! Rappelons en effet que cette centrale a été
mise en service en 1978. LÉtat le plus nucléarisé au monde reconnaît
implicitement que lincident ou laccident est possible.
La centrale du Bugey est déjà
vétuste, et accumule les problèmes.
Régulièrement lASN (Autorité de Sûreté Nucléaire), ainsi que la DRIRE
Rhône-Alpes (Direction Régionale de lIndustrie, de la Recherche et de
lEnvironnement), épinglent la Direction de la centrale. Le rapport de synthèse
souligne lexistence de "défaillances occasionnelles et dun manque de
transparence". Parmi les dysfonctionnement relevés: "une importante fuite
détectée depuis Novembre 2003 et non réparée sept mois plus tard, des procédures
erronées, incomplètes ou mal réalisées". Des informations erronées ou carrément
non transmises aux services de contrôle; insuffisance deffectif qui a contribué à
un climat préjudiciable à la qualité des interventions; manque de rigueur dans le
respect des règles en matière de radio-protection. La situation est telle que
lautorité de contrôle exige des "actions correctives dans un délai de deux
mois". En marge de mouvements de grève, le 12 juin 2003, un acte de malveillance a
entraîné larrêt durgence de la centrale. Il y a un an , un responsable de
lASN soulignait en outre que le risque sismique avait été sous-évalué. Les
associations écologistes sinquiètent aussi de larrêté ministériel du 11
Juin 2004 qui autorise la centrale à dépasser les normes jusque là en vigueur du niveau
des rejets thermiques (suite à la canicule de 2003). Le service de presse de la centrale
répond quil tiendra compte des observations qui lui ont été faites et quun
"processus correctif pour progresser" sera mis en uvre
La note aux parents, volontairement
rassurante, a ceci dambigu quelle sous-entend que ces pastilles diode
sont lantidote miracle à un accident nucléaire. Quen est-il exactement?
La boîte de 10 comprimés dosés à 130 mg d'iodure de potassium, vendue 6,15 en
pharmacie (sur commande), est produite par la Pharmacie centrale des armées à Orléans.
Elle porte la mention "À NE PRENDRE QUE SUR INSTRUCTIONS DES AUTORITÉS
COMPÉTENTES".
La directive est claire quant à ladministration des pastilles diode: il
faut les prendre au bon moment! Ni trop tôt, ni trop tard: il faut attendre le signal des
"autorités compétentes", lidéal étant de les prendre, daprès la
directive, "de 6 heures avant le passage du nuage (!!) jusquà 3 heures
après". Daprès le réseau SdN, cest plutôt 1 à 3 heures AVANT le
passage du nuage. Car laction est préventive: la thyroïde se sature rapidement en
iode et il ny a plus guère de place pour liode radioactif, qui ne peut plus
alors sy concentrer. En Pologne, une mobilisation sans précédent des pouvoirs
publics a permis ladministration à 10 millions denfants de 0 à 16 ans
diodure de potassium dans les premiers jours après Tchernobyl. Il y a eu moins
dun cas sur 10 millions deffets secondaires graves imputables à liode
chez ces enfants. Pas mal pour un pays "en voie de développement"!
Selon les conclusions de lOMS tirées de lexemple polonais après
Tchernobyl:
Le niveau dintervention pour les enfants de moins de 18 ans doit être
abaissé à 10mGy (1 RAD), au lieu de 100mGy (10 RADS): cest dix fois plus sévère
que précédemment.
Pour les adultes de plus de 40 ans la prise diode stable nest pas
utile, sauf si les niveaux diode radioactif sont très élevés. Les moins de 40 ans
en prendront utilement, les femmes enceintes représentent un groupe à risque très
menacé.
LOMS constate que peu de régions en Europe sont situées assez loin
dun réacteur nucléaire ( ); lOMS recommande que les plans
dintervention prévoient un stockage ou une distribution à domicile diode
stable jusquà 500 km dun réacteur. Ce qui veut donc dire que toute la
population française est concernée, (et pas seulement les écoles!), ainsi que nos
voisins proches
Voulant en avoir le cur net, habitant à environ 100km du Bugey, je suis allé
à ma pharmacie à Novalaise; effet de surprise garanti, autant pour les clients présents
que pour le personnel! Lapothicaire ne peut que me répondre par la négative: il
na pas de pastilles diode, il ne sait pas comment sen procurer! Mais,
intéressé par ma requête originale il consulte son Vidal; une seule adresse: la
pharmacie centrale des Armées. Il se souvient alors dune collègue pharmacienne pas
très loin de Creys-Malville qui "a dû faire un travail sur le sujet", et la
joint au téléphone. Celle-ci lui répond quà sa connaissance seule la population
dans un rayon de 20 à 30km autour dune installation nucléaire est concernée, et
peut disposer dun stock gratuit de pastilles Et pour les autres? Finalement,
quelques jours plus tard mon pharmacien ma dégotté une de ces précieuses boîtes,
gratuitement! Donc cest difficile mais pas impossible!
Je vous livre un extrait de la notice de lantidote (terme officiel):
"Le risque de contamination de la thyroïde par liode radioactif est tel que
les mesures de prévention sont dautant plus indispensables que les sujets sont plus
jeunes. Les femmes enceintes sont prioritaires, quel que soit lâge de la grossesse.
Le médicament doit être pris dès lalerte donnée.
Les limites de la prophylaxie à
l'iode stable.
Il faut absolument noter que, sil est donc indispensable que chaque Français et
chaque Savoyard ait de liode stable chez lui, ce produit ne protège nullement des
autres radioéléments également présents dans un nuage radioactif, inhalés et
ingérés en même temps que liode radioactif. Il sagit essentiellement du
Césium 137, dont la demi-vie est de près de trente ans, mais aussi du Strontium 90, du
Ruthénium et dautres, comme le Plutonium (demi-vie de plusieurs milliers
dannées), "émetteur alpha" excessivement dangereux, qui peut sous forme
daérosol à léchelle du micron se loger dans les poumons et engendrer des
foyers cancéreux dévastateurs.
En plus de ladministration diode stable, il faut se confiner chez soi
pendant le passage du nuage (fermer les fenêtres, arrêter les systèmes de ventilation,
ne pas sortir les enfants), en attendant une éventuelle évacuation.
Il faut aussi, et la directive scolaire ne le dit pas, sabstenir de toute
consommation de produits frais (lait et légumes verts) pendant environ six semaines. Il
est également impératif de tenir les vaches laitières et tout le bétail à
lintérieur pendant six semaines, leur donner du foin ou de lensilage stocké
à labri et récolté avant laccident. Ces mesures ne prétendent pas tout
régler, elles peuvent limiter les dégâts.
Français, Savoyards, Savoisiens, ayez confiance en nos "autorités
compétentes", en EDF "qui a tout prévu"! Mais faites quand même vos
stocks de pastilles, écoutez quand même Radio France Bleu Pays de Savoie (radio
"agréée" en cas dalerte), sachez quand même observer le sens des vents!
Mais surtout priez pour que cela narrive jamais.
Source: Réseau Sortir du Nucléaire, lettres dinformation n°14 (juillet 2001),
n° 16 (Décembre 2001) et n° 26 (Février 2005).
Commencer par se libérer soi-même pour pouvoir libérer son pays, cest le sens
du message que nous adresse Michel Fontaine dans son ouvrage Libérer Sa Voie (à
paraître) dont Le Savoisien publie de larges extraits.
Michel Fontaine, né en 1947, Docteur en Médecine, vit à Chamonix où il exerce la
médecine générale depuis une vingtaine dannées après avoir consacré plus de
dix ans à la recherche médicale en immunologie.
Cest de sa réflexion de chercheur, de praticien au contact des malades et de
Savoisien passionné de montagne quil tire le message fort quil nous adresse
aujourdhui.
La France est atteinte dune maladie mortelle sournoise qui agit à bas bruit: on
peut la comparer à un cancer généralisé qui aurait dépassé le stade où un
traitement pourrait être encore efficace. Elle est moribonde, mais elle ne le sait pas
encore; elle est incapable de voir les signes évidents de sa maladie et de sa mort
prochaine. La France ne sait pas voir sa maladie parce quelle est devenue cette
maladie, parce quelle se confond avec elle. La Savoie, par contre, comme elle le
signifie à travers lémergence dun mouvement autonomiste même très
minoritaire, a encore la capacité dun recul suffisant, dune conscience
delle-même et de la vie suffisante pour voir toute la gravité de cette atteinte.
Pour se guérir de la contagion que la France lui impose certains de ses habitants sont
prêts à faire le pari de la santé, de la vie, de son indépendance.
La France est coupée en deux. Une petite partie delle-même encore vivante et
courageuse qui travaille dur et produit de la richesse directement ou indirectement, des
idées, de la créativité, qui considère comme normal dassumer les incertitudes et
les risques inhérents à laventure de la vie. Cette France silencieuse, qui ne la
ramène pas est malheureusement soumise et dominée par lautre moitié
surprotégée, privilégiée, à la grande gueule, qui contraint, qui épuise, qui tue,
qui bouffe et dilapide sans aucune considération ni conscience de leur valeur la richesse
et la vie produites par la première moitié. La première moitié est lorganisme
encore sain qui cherche à vivre, à saméliorer. La deuxième moitié représente
son cancer qui a réussi à sen faire tolérer et qui se développe sur son dos
jusquà le tuer. Les signes dune mort prochaine sont déjà bien visibles:
1. Laffaiblissement des notions didentité nationale, didentité
individuelle et dintérêt commun dans la société française résulte du fait que
les êtres humains qui la composent ne peuvent plus se reconnaître collectivement dans
les valeurs quelle incarne. Une grande majorité dentre eux saccroche
désespérément aux anciennes valeurs officielles, devenues inefficaces en terme de vie,
tandis que ceux qui ressentent ce qui est dans lair savent bien que le temps de ces
valeurs est fini et quil est nécessaire de trouver les suivantes. Ainsi, la France
a "le derrière entre deux chaises" et elle na pas encore fait le choix de
quitter lancienne qui seffondre au contraire elle sy accroche de
toutes ses forces pour la nouvelle toute neuve dont elle veut nier la réalité. De
cette incohérence, il résulte pour elle une perte de son axe directeur. Ainsi, il
nest plus possible pour la plupart des Français de se reconnaître en elle, dans
son système devenu aberrant, dans son État devenu tyrannique, dans ses gouvernements
totalement dépassés par les évènements, dans labsence de modèle de
développement pour lêtre humain et dans le reniement de soi promu comme valeur
collective.
2. La notion du "Soi" français, étendard en lequel tous les citoyens
pouvaient se reconnaître et se fédérer, a disparu en raison du désaveu public par les
"élites" suicidaires qui occupent le pouvoir de notions évidentes de bon sens
telles que la préférence nationale pour lattribution des emplois,
lacceptation détrangers sur le territoire national pour un contrat de travail
(dans la mesure où ils vont répondre à des emplois que des citoyens français ne
peuvent pas pourvoir par manque de qualification) et leur retour chez eux à la fin de
leur contrat, une immigration parcimonieuse et discrète ne remettant pas en cause la
notion didentité nationale. En jetant lanathème du racisme et de la
culpabilité sur de telles valeurs dimportance vitale, ces manipulateurs de
lémotionnel collectif en interdisent toute utilisation juste, humaine, rationnelle
et réfléchie dans la société française moribonde tandis que les pays en bonne santé
les utilisent sans aucun cas de conscience comme allant de "Soi" et personne
ny trouve à redire. Labandon de "Soi", de son identité par la
France ne sera jamais une valeur de vie pour elle mais toujours un facteur de mort.
3. Devant la débâcle qui en résulte et linquiétude quelle suscite, les
Français ne peuvent plus faire référence à leur collectivité et de ce fait se
retournent vers des comportements de survie style "chacun pour soi". En
conséquence, la France se retrouve fragmentée, éparpillée. Son éclatement en groupes
manipulés, en lobbies, en corporatismes, voire en mafias signifie sa perte
didentité, son incohérence en terme de vie, dadaptation à la réalité, et
à fortiori son incapacité à évoluer. Elle est partagée en groupes de pression qui
nexercent plus leurs pouvoirs respectifs dans le sens de lintérêt de
lensemble, mais dans le sens de leurs intérêts propres au détriment de
lensemble. Ce "chacun pour soi" sur le dos de tous signifie
"débandade générale", "sauve qui peut" en catastrophe et
dislocation de lensemble. Donc la France meurt...
Seule la Démocratie directe (1), en
redonnant la parole à chacun dans tous les secteurs de la vie de sa société,
permettrait peut-être, sil est encore temps, de dégager des orientations et des
consensus généraux court-circuitant les clivages partisans, les partis politiques, les
lobbies, ladministration, les syndicats, les "grosses têtes", qui
auraient peut-être une chance de faire sens en terme de vie et douvrir de bonnes
portes. Ce serait la seule façon démocratique, incontestable et non-violente de laisser
sur la touche tous les systèmes qui paralysent et tuent la société française, qui
fabriquent et développent son cancer, qui sont son cancer.
En attendant, les Français subissent de plein fouet la pression de ce courant de mort
que leur impose leur société. Ils sont vampirisés dans leur vitalité, leur énergie
leur est volée par ce gouffre sans fond de pompage financier, de gabegie, de
détournements de richesses, délectoralisme, de clientélisme, de corruption, de
désinformation, de manipulation, de mensonge, dinfantilisme,
dirresponsabilité, de non-respect deux-mêmes, de réglementation
outrancière et absurde, dincohérence, de tristesse. Ils sentent bien que leur
société a complètement perdu la notion de leurs intérêts dindividus et
quelle ne leur propose plus quune vie desclaves modernes asservis à un
non-sens collectif sans espoir. De ce fait ils perdent le sens de lintérêt commun
ce qui accélère le processus dautodestruction de leur société.
Il suffit de porter son regard sur les grandes options politiques qui vont dans le sens
du respect et de lamplification de la qualité de la vie individuelle et collective
pour prendre conscience du niveau où ces valeurs sont considérées en France et
dévaluer le retard pris en la matière.
Par exemple, entre le moment où il avait été suffisamment établi médicalement que
lamiante était un produit cancérigène, et le moment où lÉtat sest
enfin décidé à linterdire dans la construction, il sest écoulé une
cinquantaine dannées.
En considérant que cette attitude irresponsable, suicidaire, meurtrière, prévaut
encore dans tous les secteurs clés de la vie française où des changements connus
positifs doivent se faire et ne se font toujours pas du fait de lincurie des
dirigeants, les Français sont en droit, ou plutôt en devoir vis à vis deux-mêmes
et de leur pays, de leur demander des comptes, des réparations et de les amener à
quitter le pouvoir.
Dr Michel Fontaine
(1) Pour quelle ait une chance de fonctionner, elle serait nécessairement
associée à une information libératrice objective des citoyens qui les sortirait des
conditionnements et de la subjectivité stérile de la période passée, pour solliciter
leur conscience, leur réflexion logique et leur bon sens. Il est facile de mettre une
majorité daccord sur des faits que tout le monde sait vrais, non truqués.
Cest la seule façon de mettre de côté les adhésions partisanes dordre
émotionnel qui empêchent la prise en compte objective de la réalité nécessaire pour
pouvoir proposer en retour laction defficacité optimale sur elle.
Du 9 au 15 mai 2005, un groupe de 40 Savoisiennes et Savoisiens a séjourné en
Slovénie, jeune république d'Europe centrale, pour se rendre compte des conditions
concrètes d'une indépendance acquise depuis seulement 14 ans.
La première partie du voyage avait aussi un caractère touristique, puisque le groupe
séjournait à Portoroz, au bord de l'Adriatique. La Méditerranée, à son extrémité
septentrionale, présente des golfes dont l'eau calme et changeante rappelle
irrésistiblement la "mer savoisienne" du Léman. Une visite de la péninsule de
Piran révélait la forte influence vénitienne qui marque le littoral slovène. Le
tourisme, sur ces 45 km de côtes, a su éviter les dommages d'une massification à
laquelle la Savoie n'a pas toujours su échapper. Les grands hôtels de l'époque
yougoslave ont été rénovés et répondent parfaitement à la demande d'une clientèle
internationale, friande de confort, de soleil et de bains (à la plage et aussi dans les
installations thermales intérieures). La ville de Koper (Capodistria) est aussi
d'architecture vénitienne. Elle s'est dotée d'un port de commerce qui contribue
fortement au dynamisme économique de la Slovénie; il a dépassé en importance le port
voisin de Trieste, en Italie.
photo 8-09:
photo 8-10:
Le campanile de Koper,
de pur style vénitien.
Le port de commerce de
Koper.
La question du logement.
Le revers de la médaille, dans cette ambiance de grande prospérité, c'est le
logement, comme en Savoie. Les prix, d'abord très bas au début de l'indépendance
(1991-1996) ont vite rejoint, puis dépassé, la moyenne européenne, alors que les
salaires demeurent inférieurs de la moitié.
Le littoral slovène:
l'immobilier est plus cher
que sur la côte d'azur!
Trois bonnes mesures politiques tempèrent toutefois la dureté du marché de
l'immobilier:
1. Dès sa création, l'État slovène a vendu aux locataires, à bas prix, tous les
logements qui appartenaient à l'État yougoslave: ainsi presque tous les Slovènes
sont-ils propriétaires de leur appartement ou de leur maison. Des prêts bonifiés
permettent de nouvelles acquisitions.
2. Il n'y a pas d'impôt successoral: les biens immobiliers se transmettent librement en
famille.
3. L'immigration est réduite au strict nécessaire, quelques milliers d'ouvriers,
principalement slovaques et hongrois, surtout dans le bâtiment: la natalité étant
faible en Slovénie, la demande de logements reste limitée.
Voilà un exemple d'un marché libre qui se régule tout seul grâce à l'accompagnement
d'une bonne politique sociale. Les étrangers sont dissuadés d'acheter par le très haut
niveau des prix, et les nationaux ne sont pas dépossédés du capital important dont ils
sont propriétaires. Subsistent néanmoins des cas particuliers difficiles, qui semblent
se régler grâce à la "débrouillardise"...
Trieste.
Une journée fut consacrée à la ville voisine de Trieste, avec pour guide le
président de la Slovenska Skupnost (Union slovène, membre de l'Alliance Libre
Européenne, comme la Ligue savoisienne), le professeur Drago Stoka. Le temps de
découvrir cette étrange cité, qui était le seul débouché maritime de l'empire
austro-hongrois. Trieste fut annexée par l'Italie en 1919. Alors commença un long
déclin, car pour l'Italie elle n'était qu'un port périphérique, loin des principaux
centres industriels, alors que pour l'empire austro-hongrois ce port occupait une place
stratégique irremplaçable.
Trieste et son arrière-pays naturel (la péninsule de l'Istrie, aujourd'hui partagée
entre Slovénie et Croatie) ont beaucoup souffert de la barbarie du 20e. siècle. Dans la
rizerie de Trieste fut aménagé par l'occupant allemand (de 1943 à 1945) le seul camp de
concentration sur sol italien. De nombreux résistants slovènes, croates et italiens y
furent torturés, puis déportés ou exécutés. C'est aujourd'hui un mémorial très
visité par des groupes de jeunes de toute l'Italie.
interview de Patrice Abeille
à la rizerie de Trieste,
ancien camp de concentration.
Le parti fasciste ayant été particulièrement fort à Trieste et en Istrie, les
représailles furent terribles lorsque l'armée des partisans de Tito prit le contrôle de
la zone en 1945. Massacres, confiscations, expulsions... De nombreux Italiens se
réfugièrent à Trieste, qui fut restituée à l'Italie en 1954 après une période
d'administration militaire alliée. Les Slovènes, qui étaient installés dans la région
depuis des siècles, n'ont pourtant pas quitté la ville et ses environs, ils y sont
aujourd'hui environ 50 000. Du côté de la Slovénie on dénombre encore environ 3 000
Italiens de citoyenneté slovène. Ces diverses combinaisons de nationalités et de
citoyennetés sont difficiles à appréhender quand on est habitué au système français,
qui confond les deux notions: c'est l'Europe centrale...
La politique de protection des minorités est puissamment développée, même si la
Slovenska Skupnost regrette que l'application des lois et des traités reste incomplète.
Il existe à Trieste un journal, une radio et une TV en langue slovène, et à Koper une
radio et une TV en langue italienne. Du côté italien, une scolarité en slovène est
assurée jusqu'au seuil de l'Université. Les échanges culturels sont incessants à
travers la frontière: cette démarcation historique, qui faisait partie du "rideau
de fer" entre 1948 et 1990, est toujours restée perméable, elle l'est d'autant plus
depuis 2004, quand la Slovénie a rejoint l'Union européenne et que la Croatie a accédé
au statut d'État candidat à l'adhésion.
Ljubljana.
La visite de la capitale slovène (250 000 habitants) fut avant tout historique et
politique.
Dès l'arrivée de la délégation au Grand Hôtel Union, deux conférences donnèrent
l'occasion à deux personnalités de premier plan de l'indépendance slovène d'exposer
leurs expériences et de répondre à un feu roulant de questions savoisiennes.
D'abord M. Andrej Engelman, haut fonctionnaire spécialisé dans les finances, auteur
des premiers budgets de la république de Slovénie; aujourd'hui directeur-adjoint du
Bureau gouvernemental des Affaires européennes, il met en oeuvre les efforts de son pays
pour l'intégration progressive à l'UE des nouveaux États balkaniques. La Slovénie
souhaite en effet avoir, sur son flanc sud, des voisins stables, pacifiques et prospères.
M. Engelman insista notamment sur le fait que l'adaptation de son pays aux normes
européennes n'a pas été fait sous la contrainte, mais librement et volontairement,
parce que les normes européennes correspondaient aux aspirations des partisans de
l'indépendance slovène, qui désiraient rompre rapidement avec l'héritage communiste
yougoslave.
Le deuxième conférencier était M. Francè Bucar, qui fut président du parlement
slovène au moment de l'indépendance. À travers des anecdotes tirées de sa mémoire, il
sut restituer l'ambiance des années 1990-1991, et montrer que l'émancipation de la
Slovénie est survenue, grâce à des circonstances favorables, par l'évolution d'un
rapport de force électoral et politique en faveur des élus qui défendaient l'identité
slovène. M. Bucar eut des propos fort ironiques sur les media, qui se comportèrent et se
comportent encore et toujours, avec une inépuisable servilité, comme les porte-voix du
pouvoir, quel qu'il soit: très hostiles à l'indépendance au début, les journalistes
s'y rallièrent rapidement et massivement. Quant aux politiciens, M. Bucar, qui est avant
tout un grand juriste, les tient en piètre estime: selon lui, avant 1991 ils prenaient
leurs ordres à Belgrade, et ensuite ils sont allés les prendre à Bruxelles...
La visite de la capitale et du Parlement, avec les explications de deux guides locaux,
permit de comprendre comment la nation slovène, toujours dominée politiquement (par
l'Autriche, l'Italie, la Yougoslavie) a toujours survécu par sa culture, qui constitue le
socle d'une indépendance toute neuve et pourtant nullement artificielle.
Patrice Abeille et Andrej Engelman.
La délégation savoisienne devant le Parlement slovène
Ljubljana, avec au premier plan le château.
Il restait juste le temps de voir le lac de Bled, pittoresque lieu de villégiature
(malheureusement sous la pluie) avant de reprendre l'avion de la compagnie slovène Adria,
à destination de Zürich, et de rentrer en Savoie.
Centre historique
de Ljubljana.
Un voyage riche d'enseignements: en Europe, l'indépendance d'une petite nation, c'est
possible et ça marche!