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N° 11
JANVIER  2006
 
Suppression de 193 emplois à UCAR (Tarentaise).
Le Savoisien a un an:
Loups en Maurienne.
Chablais: attention radars!
Monaco accède à la pleine souveraineté.
Pas d'OGM en Vallée d'Aoste!
30 à 60% du réseau ferré français fermés en 2025?
Politique, mémoire, histoire.
La Ligue savoisienne a choisi ses cadres.
La Ligue savoisienne a dix ans!
Un mot: seulement!
La vie de Joseph de Maistre.
Savoie souveraine et laïque.
La Ligue savoisienne au quotidien.
La République et le chaos.
Fête Nationale de la Savoie
Votre argent... à la poubelle!
Libérer sa voie? Libérer la Savoie? Libérer Sa Voie!
La Savoie, fille aînée de l'Église.
L'histoire de France falsifiée.
Rhone-Alps-Savoy
Sauvetage au Petit Saint-Bernard.
 
 
Éditorial
Politique, mémoire, histoire.
Est-il juste qu'une loi établisse la vérité historique? Sur ce beau sujet philosophique, à cause d'un amendement voté "par inadvertance" en février 2005 (sur le devoir d'enseigner le "rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord") la presse française nous régale d'une bouillie intellectuelle assaisonnée d'anathèmes, de demi-vérités, de mauvaise foi et de vrais mensonges. Participer à ces médiocres empoignades, en tant que représentants d'une nation annexée en 1860, serait nous abaisser et ne pourrait que nous nuire. Mais il ne nous est pas interdit d'en juger.
En décembre, 19 sommités universitaires demandaient l'abrogation de toutes les lois portant sur des faits historiques. Ces historiens entendaient ainsi défendre leur liberté scientifique et intellectuelle. Bien fondée dans son principe, l'initiative soulève quelques difficultés dans son application.
En effet, depuis 25 siècles que la politique existe, elle a toujours étayé ses choix, à tort ou à raison, sur des appréciations de l'histoire. La pensée politique transforme en permanence l'histoire en morales, en nécessités et en mémoires. Ainsi, trivialement (c'est le cas de le dire), quand un conseil municipal attribue à une rue le nom d'un personnage ou une date historique, il choisit, honore, privilégie un moment de l'histoire et rejette les autres dans le néant. Aucun cloisonnement sommaire ne peut ni ne doit rendre impossible un débat fructueux entre politiciens et historiens, et plus largement entre les historiens et la société toute entière.
Jusqu'ici l'agitation sur le sujet est restée strictement parisienne, et je ne connais pas un seul historien de Savoie qui ait fait connaître son avis. Les professeurs d'histoire, qui avaient cru bon de pétitionner contre la Ligue savoisienne il y a dix ans, demeurent silencieux. Si un jour ils brandissaient ici aussi l'étendard de leur liberté, nous serions alors en droit de les interpeller.
Car la liberté intellectuelle, comme toute liberté, a pour contrepartie des devoirs. Le premier d'entre eux est le respect de la vérité. Il n'est donc pas acceptable que des historiens et des enseignants, 136 ans après la chute de Napoléon III, persistent à cacher l'histoire de la Savoie et à nous faire croire qu'il n'y avait rien d'autre ici, avant 1860, que l'histoire de France. C'est pourtant ce qu'ils font presque tous sans vergogne, plaçant leur insuffisance scientifique au service de la suffisance du colonisateur français. Contraires à la vérité, ces pratiques heurtent aussi la morale, car déposséder un peuple de son histoire c'est lui enlever sa dignité et son identité. De cette injustice que nous subissons ici depuis des générations, il est bien certain que les media parisiens ne souffleront pas un mot...
Patrice Abeille.
 
Le Savoisien a un an:
meilleurs vœux et merci à toutes et à tous ses ami(e)s!
par Joël Ducros, Directeur de la publication.
Arrive un nouveau numéro au calendrier, et on ne peut s'empêcher de jeter un rapide regard sur le précédent, sur l'année qui s'est achevée conformément aux images des cartes de vœux, dans la neige et le froid.
2005 a vu naître Le Savoisien. C'était un beau bébé, sur son berceau se penchait l'expérience de celles et ceux qui faisaient auparavant L'Écho de Savoie et Le Patriote savoisien. L'enfant est vigoureux, je crois qu'il a jusqu'ici tenu ses promesses. Nous avons livré, à peu près régulièrement, les dix numéros promis, dans une présentation agréable et avec une grande variété de sujets. Tous les jours des félicitations et des encouragements nous parviennent...
Le 8 janvier 2005, nous présentions à Aix-les-Bains, au Casino Grand Cercle, notre premier numéro, qui s'ouvrait bruyamment sous la plume de Jean de Pingon, par l'exposé des motifs qu'il avance contre l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Dans le même numéro, Patrice Abeille évoquait "la question kabyle", honte de l'Algérie. C'était un choix: Le Savoisien ne se limiterait pas à des propos consensuels, il n'hésiterait pas à aborder des sujets délicats, des sujets qui fâchent. Et tant pis pour les incompréhensions, qui d'ailleurs ne se sont pas manifestées en Savoie, mais seulement en Bretagne, Occitanie et Corse... Nous annoncions aussi que le journal ouvrirait ses colonnes à des personnalités extérieures à l'orbite de la Ligue savoisienne. Nous avons tenu parole, et Patrice Abeille a publié des entretiens avec Nelly Maes (Présidente de l'Alliance Libre Européenne), Denis Bouchet, Alain Roullier (fondateur de la Ligue niçoise), Thierry Billet, Guiu Sobiela-Caanitz, Éric Fournier, Joël Baud-Grasset.
Patrice Abeille faisait place aussi à Hervé Gaymard, en commentant son récent livre (La route des Chapieux) dans notre n°2 publié début février. Propos prémonitoires, dans sa conclusion: "La pente est forte à la descente comme à la montée. Hervé pourrait bien un jour tomber dans le ravin". Le 25 février, Gaymard rentrait piteusement à Bourg Saint-Maurice...
En mars, Le Savoisien exposait l'affaire de la zone franche, qui met aux prises une citoyenne de Genève et l'administration des Douanes françaises. Les Douanes ont perdu en première instance, gagné en appel, et nous avons annoncé dans notre édition d'août-septembre que c'est notre ami Me. Thierry Mudry qui assure la suite de la procédure, en cassation et devant la Cour européenne des Droits de l'Homme.
En mai, nous avons fait le maximum pour expliquer le projet de constitution pour l'Europe et donner nos raisons de voter oui. Comme nous, la Savoie a voté oui (à 51,88% seulement) et les partisans du non ne font plus beaucoup d'étincelles!
En juin/juillet et août/septembre, un long entretien avec Thierry Mudry donnait un nouveau coup de projecteur sur les Balkans et leur histoire particulièrement complexe. En août/septembre nous reprenions le feuilleton de la vie de Joseph de Maistre, interrompu depuis l'arrêt de L'Écho de Savoie: biographie indigeste pour certains lecteurs, appréciée par d'autres, c'est notre fierté d'évoquer un personnage si important dans l'histoire des idées et si méconnu, une gloire de la Savoie. À noter aussi un entretien avec l'annécien Yann Pegaz, champion de wakeboard.
En octobre nous présentions la Slovénie, "un encouragement pour la Savoie". En novembre un livre de Michel Onfray, "Traité d'athéologie", un article de Pierre Ottin Pecchio qui a soulevé quelques vagues (voir le courrier des lecteurs ce mois-ci).
Et puis ce fut le feu d'artifice au mois de décembre, avec nos révélations sur un article de loi, jusqu'alors bien caché, qui permet aux propriétaires et fermiers de se défendre, "même avec des armes à feu", contre les "bêtes fauves", donc les loups qui inquiètent tant nos montagnards. En dernière page, une analyse du livre du chanoine Martinet ("Que doit faire la Savoie", 1848) qui nous confirme que l'annexion de 1860 fut une mauvaise affaire pour la Savoie.
Voilà donc un aperçu des principaux sujets abordés en 2005. Mais chaque mois, de manière plus brève, nous avons traité d'une multitude de questions qui concernent la vie en Savoie: transports, santé, environnement, gestion des déchets, énergie, histoire, livres, sports, politique, économie, etc.
Bien sûr Le Savoisien n'est pas Le Dauphiné ni TF1 (c'est heureux!) ni même TV8 Mont-Blanc, il ne peut pas toucher le grand public. Mais tel qu'il est, Le Savoisien fournit des informations et des analyses utiles à celles et ceux qui pensent que la Savoie serait en Europe un espace privilégié de bien-être, de liberté et de concorde, si seulement elle décidait de s'émanciper de la tutelle française. L'histoire est rarement faite par les masses, qui en sont au mieux les instruments et le plus souvent les victimes. L'histoire appartient aux minorités agissantes, et c'est à la plus créative d'entre elles, la minorité savoisienne (qui n'aspire qu'à réunir autour d'elle une majorité du peuple), que s'adresse votre journal.
Au seuil d'une nouvelle année, que j'espère aussi dense que 2005 qui fut notre première, je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui permettent au Savoisien d'exister.
Merci à nos lecteurs, en particulier à nos abonnés qui renouvellent en ce moment volontiers leur abonnement: ils savent que nous vivons avec "des bouts de ficelle" et nous envoient pour la plupart bien plus des 11 euros strictement nécessaires.
Merci aux adhérents de la Ligue savoisienne qui contribuent bénévolement à une meilleure diffusion du Savoisien.
Merci à Sophie, la trésorière de l'association éditrice, qui assure les fins de mois, toujours difficiles avec si peu d'argent, et qui fait des yeux terribles dès que votre journal dépasse les huit pages...
Merci à Evelyne, notre secrétaire administrative, toujours disponible pour nos lecteurs et nos auteurs: sa patience est presque infinie!
Merci à Nathalie, qui assure avec talent la mise en page chez Fillion Imprimerie à Allinges (Chablais).
Merci à Philippe Franke et aux imprimeurs de Savoy-Offset à Annecy le Vieux.
Merci à Guiu Sobiela-Caanitz: dans son canton des Grisons, en Suisse orientale, il n'oublie jamais de faire connaître la Savoie et nous offre périodiquement, avec son immense érudition, le témoignage de son amitié.
Merci à Pierre Ottin Pecchio, qui alimente régulièrement, avec l'aide du docteur Michel Fontaine, nos pages Environnement et Santé.
Merci à tous les contributeurs occasionnels (je ne peux citer tous les noms) qui envoient un texte, une photo, un dessin, une information et nous permettent de vous livrer un journal intéressant et varié.
Merci enfin à Patrice Abeille, le chef d'orchestre de la rédaction, dont les journées sont aussi longues que ses responsabilités sont lourdes: il est en effet le garant principal de l'autorité intellectuelle de notre publication.
Merci à toutes et à tous qui permettent, par leur engagement, minime ou important, de poursuivre cette aventure. Merci et meilleurs vœux sincères pour une année nouvelle, une année vécue pas à pas dans l'esprit qui nous unit: l'émancipation de la Savoie.
Joël Ducros, Directeur de la publication.
 
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8 janvier à Aix, aux côtés de Jean de Pingon,
de gauche à droite, l'état-major du Savoisien:
Patrice Abeille, Sophie Matrat, Joël Ducros.
 
 
 
 
Suppression de 193 emplois à UCAR (Tarentaise).
Mais que font les Savoisiens?
Après le référendum sur la Constitution Européenne, le rouleau compresseur de la mondialisation avance toujours, alors que les réformes tardent à venir. Rappelons que la basse Tarentaise avait voté non à 60%...
D’ici à la fin de l’année 2006, 129 emplois seront supprimés à l'usine UCAR de Notre Dame de Briançon, en basse Tarentaise justement, auxquels il faut ajouter 50 intérims et 14 pré-retraités. Les syndicats s’inquiètent pour l'avenir industriel de la vallée.
La guerre économique commence en Savoie.
Tous les délégués de la Ligue savoisienne en Tarentaise ont milité pour le oui à la Constitution européenne, et aujourd'hui on nous demande: "que font les Savoisiens?"
Alain Ract, le nouveau chancelier de la Ligue en Tarentaise, a dit à ces syndicats que l'immobilisme dans cette mondialisation est la mort du socialisme qu'ils défendent; nous sommes obligés d'avancer même si cela nous déplaît. Il l'avait déjà dit quand il s'était présenté en candidat libre aux municipales dans sa commune en 2002. Il l'avait écrit en conclusion (Immobilisme ou volonté d'avenir), quand il était candidat pour le Conseil Général en 2004.
Alain Ract a participé à des débats sur l’avenir de l’Europe et de la France. Beaucoup de critiques furent formulées dans le camp du oui, sur les politiciens, même sur la République, disant qu’elle était incapable de se réformer, mais pas de propositions ou de solutions! Ils attendent que Paris bouge!
Dans le camp du non, d'inspiration communiste, on essaye de trouver des solutions, surtout pour ne pas toucher aux privilèges obtenus dans ce système centralisateur. Ils oublient que les solutions passent par la responsabilisation de l’individu; il faut rapprocher les décisions du peuple. Ils ne comprennent pas que leur programme est irréalisable dans le cadre d’une république jacobine et que pour être européen, il ne faut pas être nationaliste.
Ces syndicats prétendent que nous avons la main d'œuvre la moins chère d'Europe (compte tenu de sa productivité). Nous le croyons volontiers , mais nous avons aussi la plus lourde administration d'Europe et c'est cela qui nous plombe. Les entreprises se restructurent pour résister à la guerre économique; l’administration, elle, ne se sent pas concernée dans cette guerre. Elle condamne les licenciements en manipulant les ouvriers, en leur laissant croire que c'est la faute des patrons, en République c’est toujours la faute des autres...
Disant cela, nous pensons aux élus, nous en avons trop, ils nous coûtent très cher, quand nous voyons à quoi ils servent, nous sommes en droit de nous poser des questions!
Une entreprise ça compte, c'est tout! Aux élus de nous prouver que notre main d’œuvre est la meilleure et la moins chère. À eux de réformer, de se réformer!
Enfin, syndicalistes et autres partisans du non, soyez un peu plus cohérents dans vos analyses. Vous pensiez sauver l'essentiel en refusant la Constitution Européenne et vous avez voté contre les recommandations de la Ligue Savoisienne; ne venez pas, aujourd’hui, pleurer dans notre gilet et ne nous demandez plus: "Mais... que font les Savoisiens?"
Le comité (LS) de Tarentaise.
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UCAR:
Un des plus gros producteurs mondiaux
de cathodes en graphite. 600 salariés
sur le site de Notre-Dame de Briançon
(en aval de Moutiers).
 
 
Suppression de 378 postes à Salomon (Rumilly et Annecy).
La désindustrialisation s'accélère.
De même qu'en Tarentaise (voir l'article précédent), l'inquiétude grandit dans le bassin annécien et l'Albanais, depuis le 20 décembre, date à laquelle l'entreprise Salomon (rachetée à Adidas par le groupe finlandais Amer Sports, propriétaire de la marque de skis Atomic) a annoncé la suppression de 378 emplois en 2006. La production de skis, lancée à Rumilly en 1990 dans une usine neuve et ultra-moderne, va être réduite à quelques modèles de haut de gamme, la Roumanie prenant le relais pour l'essentiel de la fabrication. D'autres services sont touchés sur Annecy.
C'est le début de la fin d'une épopée industrielle annécienne, lancée dès 1947 par le fondateur Georges Salomon, qui avait commencé avec son père comme artisan dans les vieux quartiers d'Annecy. Il faut se demander pourquoi Georges Salomon a décidé, en 1997, de vendre son entreprise à Adidas, au lieu de la transmettre à ses héritiers ou à une fondation incorporant les salariés. N'est-ce pas parce que le système français fait tout pour décourager l'entreprise privée? N'est-ce pas parce qu'il est bien plus avantageux en France d'être rentier, en utilisant les montages financiers de défiscalisation les plus sophistiqués, que d'être entrepreneur?
On ne brille pas non plus d'optimisme à Tefal, à SNR ni d'une manière générale dans l'industrie. Pourtant la situation de l'emploi reste globalement bonne en Savoie du nord. De nombreuses offres d'emploi demeurent disponibles, notamment dans le bâtiment et le tourisme. Mais la conjoncture serait nettement plus morose sans l'appoint des salaires des frontaliers, dont le nombre a atteint 50 000 à Genève (un record historique), qui recrute aux trois-quarts en Haute-Savoie.
Il serait temps de comprendre que ce n'est nullement la France qui assure les revenus des Savoyards (elle fait fuir les employeurs) mais bien plutôt le voisin helvétique, l'Europe et la mondialisation. En effet la clientèle touristique est de plus en plus internationale, et le succès des industries (il y en a de brillantes, comme SOMFY à Cluses) dépend essentiellement de l'exportation. À chacun d'en tirer les conséquences.
 
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Le siège social de Salomon à Pringy près d'Annecy.
 
Loups en Maurienne.
Forte mobilisation pour l'application de la loi.
Le Savoisien de décembre (n°10) a eu du succès en Maurienne auprès des montagnards, qui ont pu y découvrir le texte de l'article L427-9 du code de l'environnement. L'info faisait la Une de votre journal, et elle était de taille: cet article de loi, soigneusement caché jusqu'alors à la connaissance du public concerné, autorise "tout propriétaire ou fermier" à "repousser ou détruire, même avec des armes à feu, mais à l'exclusion du collet ou de la fosse, les bêtes fauves qui porteraient dommages à ses propriétés". Ainsi un éleveur qui abattrait un loup menaçant pour son troupeau ne pourrait-il pas être poursuivi en justice au nom de la protection de l'espèce "canis lupus".
Lors de la conférence publique de Termignon, organisée le 3 décembre par des éleveurs de Haute Maurienne (avec la présence de Patrice Abeille, directeur de la rédaction du Savoisien), l'assemblée à décidé d'envoyer au préfet de la Savoie (à Chambéry) une lettre-pétition pour lui demander de quelle manière il entend appliquer la loi. Cette lettre-pétition a déjà recueilli des centaines de signatures dans toutes les communes de Haute Maurienne. La réponse du préfet est attendue pour les prochaines semaines.
Actuellement les troupeaux sont en sécurité dans les bergeries. Au printemps les alpagistes seront moins démunis face aux attaques probables des loups. Grâce au Savoisien!
 
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Patrice Abeille et Jean Blanc à Termignon
le 3 décembre 2005.
Chablais: attention radars!
Deux radars fixes ont été récemment installés dans la province du Chablais:
- l'un sur la D903, entre Bons et Thonon, au carrefour de Mésinges: attention, la vitesse est limitée à 70 km/h en descente;
- l'autre sur la RN5 à l'entrée de Sciez, dans le sens Massongy-Sciez au lieu-dit "La Croix de Filly": la vitesse est limitée à 90 km/h.
Chers amis lecteurs du Savoisien, respectons les limitations de vitesse, et ainsi nous sauverons des vies!
Jean Jacquier, chancelier de la Ligue savoisienne en Chablais.
 
Ferroviaire:
30 à 60% du réseau ferré français fermés en 2025?
 
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Le 7 septembre 2005 a été rendu public un audit du réseau ferré français, effectué pour la SNCF et RFF (1) par un groupe d'experts suisses. C'est une grande première! Le résultat est édifiant: les experts indépendants dressent un tableau alarmant de l'infrastructure ferroviaire, en la comparant aux réseaux d'Italie, de Suisse, d'Espagne et du Royaume-Uni.
L'audit décrit l'inadaptation et la vétusté des voies ferrées, l'absence de planification de l'entretien et du renouvellement, l'insuffisance des budgets depuis 20 ans, la mauvaise organisation des chantiers, les méthodes de travail archaïques, la faible productivité des travaux. N'en jetez plus...
Les experts donnent leurs conseils pour la modernisation du réseau, qui pourrait, si elle est bien conduite, dégager des économies substantielles sur les travaux et aussi l'exploitation (la gestion du trafic).
Mais la situation est si dégradée qu'elle exige quand même de renforcer les budgets "voies ferrées" (aujourd'hui 2,7 milliards d'euros par an) de 10 à 20 milliards d'euros sur le cumul des 20 ans à venir, pour obtenir en 2025 un système maintenu ou optimisé. Or les endettements colossaux de l'État et de RFF ne le permettront pas.
C'est donc un scénario sombre qui paraît le plus probable: si les budgets de maintenance n'augmentent pas, les experts ont calculé qu'en 2025 c'est 30 à 60% du réseau français qui sera fermé à la circulation. Ne subsisteront que les lignes à grande vitesse et quelques axes majeurs nationaux ou de banlieue. Déjà le déclin a commencé en 2005 avec le ralentissement des trains sur les tronçons les plus dégradés.
La difficulté paraît insoluble, après des décennies d'imprévoyance de la technocratie française. La SNCF et RFF ont pourtant reçu l'ordre du ministre des transports de présenter rapidement un plan 2006-2010 sur la base des recommandations de l'audit. De la bagarre en perspective si RFF demande à la SNCF de revoir ses méthodes de travail, ou obtient le droit de faire réaliser ses chantiers par des entreprises privées...
(1) Réseau Ferré de France, propriétaire des voies ferrées depuis 10 ans, est une structure essentiellement financière. RFF ne peut faire réaliser la maintenance du réseau que par la SNCF, qui lui en facture le coût.
 
Source: mensuel "Le Rail" n°121, novembre 2005.
 
 
Monaco accède à la pleine souveraineté.
Le fait est passé quasi inaperçu, la France ayant noyé le poisson et Monaco ayant eu le triomphe modeste. Les deux anciennes conventions qui mettaient Monaco sous tutelle de la France ont été "dépoussiérées".
De nouveaux accords ont été signés à l'Élysée par le président de la République et le prince Albert II. La France ne pourra plus intervenir dans la succession princière et les Monégasques pourront accéder aux postes réservés, jusque-là, à de hauts fonctionnaires français, le plus important étant celui de ministre d'État.
Ces accords quasiment passés sous silence sont très importants pour Monaco, qui se voit reconnaître sa pleine indépendance. Les deux parties ne se sont pas étendues outre mesure sur le nouveau traité, mais ce qui est présenté comme un "dépoussiérage" a été arraché de haute lutte par SAS le prince Rainier III.
Dès son accession au pouvoir, il avait été en butte à l'intransigeance du général De Gaulle qui, pour le faire céder, n'avait pas hésité à isoler la Principauté en installant une douane aux frontières des deux États.
Le Prince céda en apparence, mais peu à peu, avec pugnacité et une détermination sans faille, il obtint que Monaco soit représenté à l'UNESCO, au Conseil de l'Europe et dans toutes les instances internationales. Il fit même en sorte que les numéros de téléphone monégasques relèvent de l'international et ne soient plus des numéros français.
De même, il obtint de la France l'élargissement du domaine maritime et aérien. Il n'aura pas eu la joie de voir le couronnement de son oeuvre et il est symbolique que ce soit son fils, Albert II, qui, quelques jours à peine avant son intronisation officielle, signe à l'Élysée le nouveau traité faisant de Monaco un pays à part entière.
Grâce aux efforts incessants du prince Rainier III, son fils règne maintenant sur un pays indépendant. Vouloir l'indépendance de son pays et l'obtenir est la plus belle chose qui soit, c'est pourquoi les Monégasques garderont pour le défunt prince une gratitude infinie.
(Article extrait du n°21 des "Nouvelles Niçoises" page 7. Le journal indépendantiste conclut ensuite en invitant les Niçois à faire confiance à la volonté populaire et à réclamer fermement la liberté qui leur est due en rétablissant leurs droits bafoués en 1860. Les Savoisiens feront de même en songeant à ce qu'ont gagné quelques milliers de Monégasques, mais aussi au statut enviable des cantons suisses souverains, tous moins peuplés que la Savoie: libertés, pouvoir d'achat, emploi, démocratie, environnement...)
 
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Palais princier de Monaco
 
 
 
Pas d'OGM en Vallée d'Aoste!
Première région européenne à se doter d'une réglementation claire des OGM, la Région Autonome Vallée d'Aoste démontre encore une fois l'avantage d'être autonome.
Une proposition de loi, qui découle directement des normes communautaires (directive 2001/18) portant sur la coexistence des cultures transgéniques, traditionnelles et biologiques, a été présentée à la séance des 9-10 novembre du Conseil régional. Elle a pour but de réglementer, en particulier, l'utilisation des OGM en agriculture... c'est-à-dire de les interdire. La consultation préalable des professionnels et des associations de consommateurs a été très démonstrative: ceux-ci demandent à l'unanimité d'empêcher la production d'aliments OGM sur le territoire de la Vallée et de favoriser les produits de qualité haut de gamme respectant les traditions œnologiques et gastronomiques du territoire.
Une campagne d'information des agriculteurs et des acteurs technico-économiques concernés sera entreprise après examen de la proposition par la Commission compétente et son approbation par le Gouvernement de la Région autonome.
 
source: "Le Peuple Valdôtain" n°46, 8 décembre 2005.
 
 
 
 
La Ligue savoisienne a choisi ses cadres.
Chaque année le Congrès de la Ligue procède à l'élection des cadres provinciaux du mouvement et de certains responsables. Comme le prévoient les statuts, le Conseil des Provinces élu par le Congrès se réunit dans le mois qui suit pour élire la direction exécutive de la Ligue. Voici les résultats complets de ces opérations.
 
Les comités provinciaux élus.
Les trois premiers de chaque province (le chancelier, le vice-chancelier et le trésorier) composent le Conseil des Provinces, qui est le parlement de la Ligue savoisienne.
 
Chablais.
Chancelier: Jean JACQUIER
Vice-chancelier: Magali BOUVAREL
Trésorier: Dominique BONDAZ
Suppléants: Pierre OTTIN PECCHIO
Sylvie CADDOUX
Alain PITTARD
Membres: Edith PAOLY
Simon JACQUIER
Denis MOCELLIN
Philippe DECONCHE
Alain FAYARD
Gérald CALMUS
Faucigny.
Chancelier: Gilles ROSSET
Vice-chancelier: Alain BURTIN
Trésorier: Jo DUPRAZ
Suppléants: Anne-Marie ROSSET
Pierre BORREL
Thierry BÉNÉ
Membres: Marie-Thérèse BÉNÉ
Philippe BÉNÉ
Christian DEVILLAZ
Raymond LALLIARD
Michel Jean MUGNIER
Edmond SONNEVILLE
Genevois.
Chancelier: Evelyne ANTHOINE
Vice-chancelier: Sophie MATRAT
Trésorier: Paul GIRARD
Suppléants: Marcel THOVEX
Olga VERGAIN
Christian PONS
Membres: Bernard FAUVELAIS
Bruno BEAUQUIS
Jean-Claude BUFFIN
Anne-Marie PRUNIER
Sylvie BARDEL
Alain DUPUIS
Savoie Ducale.
Chancelier: Michel VIBERT
Vice-chancelier: Christia VALIGURA
Trésorier: Marc VIROT
Suppléants: Claudette MURAZ
Jean-Luc ÉVREUX
Guy MAISON
Membres: Claudette ABRY
Marie ANDRIAN
Luc BILLARD
Gilbert CHAMONAL
Claude GERVAIS
Jacky GURRET
Tarentaise.
Chancelier: Alain RACT
Vice-chancelier: Joseph RUFFIER
Trésorier: Daniel GLATIGNY
Suppléants: Georges MONDEL
Jean-Jacques RUFFIER
Pierre FARINA
Membres: Louis LOMBARD
Gérald WOJTAL-AILLAUD
Julien GAIDET
Gilbert CULLET
Alphonse ABONDANCE
Viviane MARTIN
Maurienne.
Chancelier: Éric GARADIER
Vice-chancelier: Albert PRALLET
Suppléant: Jean BLANC
Membres: Éric MONTAGNON
Henriette VILLETON
Gilles DEQUIER
Olivier EXCOFFIER
 
Éric Garadier, élu chancelier de Maurienne, et le comité de cette province (Albert Prallet, Henriette Villeton, Jean Blanc) tiennent à remercier tous les adhérents mauriennais qui ont participé activement au succès du 10e. Congrès de la Ligue savoisienne. Ils les invitent à se mobiliser encore davantage lors du rassemblement de la Fête nationale, le 19 février à Chambéry: allocutions, banquet et musique à la salle des conventions de Bissy.
Bonne année 2006, faite de bonheurs personnels et familiaux et d'avancées courageuses vers l'émancipation de la Savoie!
Éric: 06 68 17 53 22
Albert: 04 79 36 21 46
 
Les autres élus du Congrès.
Secrétaire des Jeunes Savoisiens: David FRANK
Commissaire aux comptes: Bernard FAUVELAIS
Commissaire aux comptes adjoint: Thierry TISSOT-DUPONT
Membres d'Honneur du Conseil des Provinces: René Besenval (Val d'Aoste), Giorgio Filograna (Piémont), Éric Caboussat (Vaud).
 
Les élus du Conseil des Provinces.
Le Conseil des Provinces s'est réuni le 4 décembre 2005 et a procédé aux élections statutaires à bulletins secrets. Voici les résultats.
Gilles Rosset (chancelier du Faucigny) a été élu chancelier de Savoie: c'est lui qui préside les réunions du Conseil des Provinces.
Sophie Matrat (Trésorière) et Jean-Claude Buffin (Trésorier suppléant) ont été renouvelés dans leurs fonctions.
Le Bureau exécutif a été reconduit dans son ensemble pour un an: Patrice Abeille (Secrétaire général), Joël Ducros (Secrétaire général adjoint), Christian Montagnon et Michel Jazarguer (Délégués aux provinces).
 
Conseil consultatif (organe de surveillance):
Georges Billard et Pierre Mudry ont été élus par le Conseil des Provinces.
Jean-Marc Jacquier a été désigné par le Bureau exécutif.
Alain Dupuis et Guy Martin ont été désignés par Jean de Pingon (président du Conseil consultatif sortant).
À l'ensemble des élus, Le Savoisien souhaite bon travail en 2006 pour la Savoie!
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Gilles Rosset a été élu
chancelier de Savoie.
David Frank,
Secrétaire des Jeunes Savoisiens.
 
 
 
 
 
 
La Ligue savoisienne a dix ans!
Version abrégée du discours de Patrice Abeille, prononcé à la fin de la première journée du 10e. Congrès de la Ligue savoisienne, à Doussard (Genevois) le samedi 5 novembre 2005.
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De gauche à droite:
Pere Mateu (Bloc Català)
Ramuntxo Camblong (Parti Nationaliste Basque)
Patrice Abeille,
Mikel-Anton Zarragoitia (Gouvernement basque),
Thierry Mudry, Jean de Pingon.
De gauche à droite:
Rafko Dolhar (Union Slovène),
Mikel-Anton Zarragoitia (Gouvernement basque).
 
Chers amis de la Savoie, Savoisiennes, Savoisiens,
Le moment est venu, à mi-chemin de ce dixième Congrès, foisonnant d'idées et de volontés réunies comme d'habitude, de nous pencher ensemble sur le chemin parcouru, ces dix années au cours desquelles nous avons partagé tant d'expériences, d'épreuves, de déboires et de succès. Car aujourd'hui, la Ligue savoisienne a dix ans. Dix ans, ce n'est rien dans l'histoire de l'humanité, dans l'histoire de l'Europe, dans l'histoire de la Savoie, mais dix ans, c'est déjà beaucoup dans l'histoire de notre mouvement, dans notre histoire individuelle et collective. Il suffit de songer un instant à ce que nous étions il y a dix ans, à ce que nous sommes devenus ensemble. Malgré toutes nos difficultés, toutes nos déceptions, toutes nos frustrations, regrettons-nous de nous être engagés ensemble dans la voie de l'émancipation de la Savoie? Non, certainement, nous pouvons être fiers d'avoir résisté ensemble à toutes les tentatives de sabotage et d'étouffement de nos aspirations légitimes, d'avoir proclamé sans relâche, et pour la première fois depuis la funeste annexion de 1860, notre ambition commune: l'émancipation de la Savoie!
Je ne vous infligerai pas un historique détaillé de la Ligue savoisienne depuis 1995. J'en serais d'ailleurs bien incapable, car ma tâche quotidienne de Secrétaire général ne me permet pas de plonger longuement dans nos archives. Plus tard viendront des historiens, qui détailleront les phases de notre évolution. Aujourd'hui, il s'agit d'évaluer le chemin parcouru. Je vais tenter de le faire de manière toute personnelle, autour de quelques thèmes: notre naïveté initiale, notre ancrage fédéraliste, nos engagements internationaux, notre stratégie pour le présent et pour l'avenir.
Que fait la Ligue?
Samedi dernier j'étais à Aoste, en compagnie de Pierre Ottin Pecchio: la Ligue savoisienne était invitée au Congrès de l'Union valdôtaine, qui célébrait son soixantième anniversaire, car elle fut fondée le 13 septembre 1945. Dans ma pochette de congressiste, j'ai trouvé ce petit livre, "Vie de l'Union valdôtaine". Il fut publié en 1995, pour le cinquantenaire du mouvement. Il s'agit d'un recueil d'articles d'Émile Proment, qui fut rédacteur, puis directeur, de 1948 à 1977, du journal de l'Union valdôtaine, et rédigea des éditoriaux jusqu'en 1995. J'ai lu ce livre, j'y ai trouvé du réconfort et de l'espoir. Car l'Union valdôtaine est née, comme notre Ligue savoisienne, dans un grand élan de ferveur populaire. Les Valdôtains avaient beaucoup enduré, depuis 1922, de la dictature mussolinienne qui avait voulu les italianiser de force. Ils avaient, comme tous les autres Européens, beaucoup souffert de la guerre. Enfin ils étaient libres, et la toute nouvelle Union valdôtaine portait en avant tous leurs espoirs. En 1946 et 1947 il n'y eut pas moins de 4 congrès, qui déplacèrent des foules considérables. La tentative française d'annexion ayant échoué en 1945 (grâce à l'intervention énergique du président américain Truman, qui donna l'ordre à Charles De Gaulle de retirer ses troupes et ses agents), la République italienne, à peine fondée et marchant du pas mal assuré d'un petit enfant, accorda au Val d'Aoste un statut d'autonomie, certes inférieur aux projets de l'Union valdôtaine, mais bien réel.
Dès l'été 1948, pourtant, Émile Proment signale le désenchantement des Valdôtains, et en particulier des Unionistes. Le temps des grands rassemblements est passé. Tout le monde se plaint. Certains accusent même l'Union Valdôtaine de ne pas défendre les intérêts des Valdôtains. Émile Proment contre-attaque. Je vous lis son éditorial du 31 août 1948.
À qui la faute?
On trouve encore des Valdôtains dont l'ignorance de ce qui se passe ou la mauvaise foi sont si absolues qu'elles leur font accuser l'Union valdôtaine de ne pas défendre les intérêts des Valdôtains!!!
Or s'il existe en Vallée d'Aoste un mouvement qui défend les intérêts des Valdôtains en tant que Valdôtains, ce mouvement est l'Union valdôtaine et rien que l'Union valdôtaine.
Sans doute, il est peut-être vrai aussi que l'Union valdôtaine pourrait faire plus qu'elle ne fait. Mais à qui la faute surtout? Je n'hésite pas à le dire: aux Valdôtains mêmes ou plus précisément à une fausse conception qu'ils se forment de cette Union valdôtaine.
En effet, la plupart considèrent l'Union valdôtaine comme quelque chose de transcendant, venu des hautes régions de l'atmosphère, une espèce de puissance surnaturelle de laquelle on attend des miracles.
Il est certain qu'avec une conception de ce genre, on se contente de rester tout le temps les bras croisés, en attendant que la manne tombe du ciel. Or si tous les Valdôtains étaient ainsi, il est probable qu'ils attendraient en vain, car l'Union valdôtaine n'est pas une puissance transcendante à laquelle il suffit de demander, mais une force essentiellement immanente, née du peuple valdôtain lui-même et résultat des efforts conjugués de tous les Valdôtains qui se sentent avant tout Valdôtains.
Le but de l'Union valdôtaine est de grouper et diriger, et en groupant et dirigeant de multiplier à l'infini les forces que les Valdôtains consacrent à la défense de leurs intérêts communs; mais ni l'Union valdôtaine ni aucune puissance en ce monde ne pourra jamais grouper et multiplier des forces si elles n'existent pas. Il faut donc un minimum de forces initiales qui ne peut venir que de l'individu, de chaque Valdôtain en particulier.
Donc, si un Valdôtain veut que l'Union fasse du bon travail, il doit commencer par être, lui-même, un unioniste et un unioniste actif et convaincu; il doit, autrement dit, consacrer une partie de ses forces aux intérêts communs des Valdôtains, et les consacrer dans le cadre de l'Union valdôtaine, afin qu'elles se multiplient et rendent leur maximum.
Si l'Union valdôtaine a fait du bon travail valdôtain (et elle en a fait incontestablement) c'est parce que de nombreux Valdôtains ont compris et appliqué ce que nous venons de dire, sans besoin d'explications ni d'invitations. Si l'Union valdôtaine n'a pas fait tout le bon travail qu'elle aurait dû faire, c'est que trop de Valdôtains n'ont pas compris ou n'ont pas eu le courage d'appliquer ce que nous venons de dire.
Mais ceux-ci, en critiquant l'Union valdôtaine, se condamnent eux-mêmes, puisqu'ils se trouvent au nombre de ceux dont la paresse et l'égoïsme ont freiné le Mouvement en ne lui fournissant pas cette part d'effort qu'ils auraient dû lui fournir.
Émile Froment, 31 août 1948.
 
 
Cela ne vous rappelle rien? Si, bien sûr! Vous en entendez comme moi, des lamentations, des plaintes, à l'intérieur comme à l'extérieur de la Ligue! On regrette le temps des grands rassemblements. Le premier Congrès, à Albertville le 26 mai 1996: mille personnes, 800 selon les Renseignements Généraux qui avaient, eux, le temps de compter (j'ai lu cet été leur rapport dans mon dossier à la Préfecture d'Annecy). La manifestation au tunnel du Mont-Blanc et à Genève, le 6 octobre 1996. Les conférences publiques qui, en 1995 et 1996, déplaçaient parfois le public en masse. On a oublié, bien sûr, que nous faisions aussi des conférences devant dix personnes, parfois moins...
Tout le reste de ce livre fourmille des regrets d'Émile Proment, qui constate le découragement des militants, les abandons, les défections, les tentatives de détournement de l'action, l'opportunisme de ceux qui oublient les objectifs fondamentaux du mouvement... Je ne peux évidemment pas vous infliger la lecture complète de ce livre, mais sachez qu'elle est instructive pour des femmes et des hommes comme nous, engagés dans une action qui n'est vraiment pas facile...
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"On est même pas capable d'entretenir nos bornes"
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Elles ne manquent pas, les critiques qui ne sont faites que pour nous démoraliser. Ainsi un adhérent jugeait-il à propos de nous écrire, fin octobre, ceci:
"Quand j'ai pris ma carte d'identité "État souverain de Savoie", j'étais fier de la montrer, j'étais motivé pour une cause juste. En 2005 c'est plus le cas, on piétine et on est même pas capable d'entretenir nos bornes frontière avec la France. Celle qui en place depuis 1822 au lieu-dit "Les marches" sur la RN90 vers le restaurant "la ferme de Champlon" est triste à voir. Elle est sale, pleine de mousse au pied et la broussaille avance autour."
Cet adhérent fournit même un plan pour trouver la borne.
Il aurait pu réunir des amis pour aller nettoyer la borne et couper la broussaille. Et prendre une photo des Savoisiens à l'ouvrage, qui aurait été publiée dans notre journal. Mais non, il n'en a pas eu l'idée. Selon lui, c'est "La Ligue" qui doit nettoyer les bornes. Il me vient à l'esprit la phrase du sapeur Camembert: "Quand les bornes sont franchies, il n'y a plus de limites!"
De la naïveté et du populisme.
Au début, donc, c'était bien: il y avait du monde, il y avait de l'enthousiasme, il y avait de l'espoir. Mais pourquoi ce succès si rapide? La Ligue savoisienne, en 1995 et 1996, était-elle naïve? Populiste?
Naïfs, nous l'avons tous été quelque peu, en effet. Nous avons constitué la Ligue savoisienne pour, selon l'article 2 de nos statuts, "restaurer la souveraineté du peuple savoisien, en faisant constater la caducité du Traité d'Annexion à la France". Nous avons donc imaginé qu'il suffirait d'expliquer précisément en quoi le traité de 1860 est caduc, comment la France se maintient abusivement sur notre territoire savoisien, pour que toutes les personnes concernées se lèvent en masse et chassent le pouvoir français de ses places usurpées. Nous avons donc propagé la connaissance de la caducité du traité de 1860. Par notre journal, Le Patriote Savoisien, puis L'Écho de Savoie, aujourd'hui Le Savoisien. Par le livre de Jean de Pingon, "Savoie française, histoire d'un pays annexé". Par d'innombrables conférences, publiques ou privées.
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"La Ligue savoisienne n'a jamais avancé une idée ni un fait qui n'ait été soigneusement vérifié et pesé"
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Populistes, nous ne l'avons jamais été. Certains Français, à l'extrême gauche ou autour de Nicolas Sarkozy, se revendiquent aujourd'hui populistes en prétendant qu'ils seraient proches du peuple. Mais généralement le populisme est une perversion de la démocratie, dans le même sens que ce qui était autrefois appelé démagogie. Le populisme, comme la démagogie, consiste à utiliser sans vergogne ce que croit le peuple, et à miser sur les passions populaires, pour tenter de conquérir le pouvoir. Nous ne l'avons jamais fait. Certains, parmi nous, ont pu naïvement croire et faire croire que dans la Savoie libre il n'y aurait plus d'impôts, plus de lois, plus de solidarité. Mais tel n'a jamais été le message de la Ligue savoisienne. La Ligue savoisienne n'a jamais avancé une idée ni un fait qui n'ait été soigneusement vérifié et pesé. Le précédent pape, Jean-Paul II, avait commencé une de ses encycliques par ces mots: Splendor veritatis. La splendeur de la vérité! Eh bien la Ligue savoisienne tente depuis dix ans, dans ce pays, de faire éclater la splendeur de la vérité. Et la vérité heurte souvent le sens commun, elle n'est pas toujours facile à entendre. Mais les années qui passent emportent peu à peu, dans le grand courant de la faillite française, les mensonges dont la France nourrissait sa domination, et peu à peu notre vérité savoisienne émerge.
Cette vérité, c'est que la Savoie est une des plus anciennes nations d'Europe, que notre pays a été annexé par la France au moyen du mensonge et de la fraude, que le contrat d'annexion n'a pas été respecté, que la Savoie aujourd'hui a les moyens de sa liberté et qu'elle a droit à une place en Europe à égalité avec les autres nations. C'est cette vérité que nous avons exposée publiquement depuis 1995, et nous pensions qu'elle était si éclatante qu'elle suffirait à libérer notre pays.
La construction du projet savoisien.
Mais cela ne suffisait pas, et cela n'a pas suffi. La Savoie avait peur de l'inconnu. Les gens nous disaient: "Vous avez peut-être raison, mais de quoi sera faite la Savoie libre? Que proposez-vous?" Il a donc fallu construire notre projet politique en le confrontant aux attentes les plus générales.
Dès le début nous avons répondu à une grande question: qui sera Savoisien? Dès le premier Congrès nous avons établi le principe que toute personne établie en Savoie le 26 mai 1996 aurait droit à la citoyenneté dans l'État souverain de Savoie. Ensuite nous avons complété ce principe par des dispositions qui permettent d'intégrer toutes les personnes ayant des attaches familiales en Savoie ou arrivées plus tard pour s'y établir.
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"Savoisien aujourd'hui, c'est plus un choix qu'un héritage"
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Dès août 1995, notre première publication, Le Patriote Savoisien, s'était choisi une devise: "Savoisien aujourd'hui, c'est plus un choix qu'un héritage". Quelle n'est pas notre fierté de lire, dans Le Monde du 3 novembre dernier, les propos de notre ami Josep-Luis Carod-Rovira: "être catalan, ce n'est pas un héritage, c'est un choix. C'est l'expression démocratique d'une volonté personnelle". Carod-Rovira est le secrétaire général du parti indépendantiste ERC, qui est au gouvernement de la Catalogne. Lui au moins, il lit le Savoisien...
Ceux qui nous reprochent cette ouverture, car il y en a, feraient bien de réfléchir. De reconnaître d'abord qu'un projet qui serait fondé sur l'exclusion, dans l'Europe d'aujourd'hui, serait voué à l'échec. De reconnaître ensuite qu'eux-mêmes, qui sont si fiers d'être de "vrais Savoyards", avec plus de trois générations au cimetière, sont souvent les plus empressés aux cérémonies tricolores présidées par les préfets. Or les Savoyards, qui évidemment sont encore majoritaires en Savoie, détiennent la solution: la Savoie ne changera d'orientation que quand ils le décideront en masse. Ceux qui sont ici de passage ne comptent pas. Ceux qui sont originaires de Savoie peuvent reprendre le pouvoir sans exclure les autres, comme on le voit dans les cantons suisses, où pourtant les étrangers ne manquent pas.
Une fois réglée la question du "qui?", nous avons travaillé à celle du "comment?".
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"Après avoir été moqués comme de doux rêveurs, nous avons été vilipendés comme des égoïstes..."
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Bien sûr il a fallu vérifier si la Savoie avait les moyens économiques et financiers de vivre sans la France. Cela n'a pas été difficile, et pourtant la France, il y a dix ans, n'en était pas encore à la situation calamiteuse qui est la sienne à présent. Nous avons donc facilement démontré qu'avec son territoire de 10 000 kilomètres carrés, sa population d'un million d'habitants (avec une proportion élevée d'actifs et relativement peu de chômeurs), la Savoie constitue une entité parfaitement viable économiquement. Et nous avons prouvé aussi, sans jamais être démentis, que la fiscalité française nous dépouille chaque année de plus d'un milliard d'euros, déduction faite de toutes les redistributions de l'État en Savoie. Conséquence de ces deux démonstrations: après avoir été moqués comme de doux rêveurs, nous avons été vilipendés comme des égoïstes...
Il a fallu donner aussi des orientations politiques. C'est à ce besoin qu'a répondu notre Projet de Constitution, qui fut achevé par le vote de notre troisième Congrès, le 4 octobre 1998. Par ce texte, la Ligue savoisienne se rattache au fédéralisme et s'inspire donc de l'exemple helvétique. Notre fédéralisme n'est pas de pure forme institutionnelle, comme pour ceux qui voudraient instaurer un gouvernement européen sans rien toucher au centralisme français qui écrase et appauvrit le peuple de l'hexagone. Notre fédéralisme est intégral et comporte toutes ses composantes de liberté et de démocratie: libertés communales et provinciales, séparation des pouvoirs, démocratie directe par le référendum d'initiative populaire. Ce n'est surtout pas une mini-France que nous proposons d'instaurer en Savoie, mais une fédération de six provinces libres de s'administrer de manière largement autonome. Comme le fédéralisme répond aux besoins politiques de la plupart des nations européennes (et de bon nombre d'autres nations hors d'Europe), de même il ne décevra pas dans notre Fédération savoisienne.
Solidarités internationales et présence sur le terrain.
Pendant toutes ces années d'élaboration de notre projet, nous avons en même temps établi des contacts extérieurs. Avec nos faibles moyens et notre manque d'expérience, ce n'était pas facile, et nous avons procédé par tâtonnements. Mais cette recherche était et demeure guidée par trois objectifs: apprendre au contact d'autres nations en demande d'émancipation; faire connaître la Savoie en Europe et en France; bâtir des solidarités internationales.
Je ne présenterai pas en détail le réseau de nos relations internationales. Il suffira de rappeler que depuis six ans, en étant membre de l'Alliance Libre Européenne, la Ligue savoisienne dispose d'une porte d'entrée au Parlement européen et qu'elle a pour alliés de puissants partis écossais, gallois, flamand, basque et catalan. Il n'en demeure pas moins vrai que nous devons compter, comme chacun de nos alliés, essentiellement sur nos propres forces. Au sein de la fédération hexagonale Régions & Peuples Solidaires, nous avons appris à connaître les représentants des nations "périphériques" de France. Même si cette coopération a pris fin en août dernier, ce n'est pas de notre fait, c'est peut-être provisoire. Et notre Congrès s'honore une fois de plus cette année de la présence de nombreuses délégations extérieures. Nous sommes particulièrement heureux d'accueillir pour la première fois un délégué de l'Union Slovène, M. Rafko Dolhar, et un représentant du Gouvernement basque de Gasteiz (Pays Basque sud), M. Mikel Anton Zarragoitia.
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"Chaque fois que l'occasion se présente, la Ligue savoisienne indique au peuple de Savoie le chemin qu'il peut emprunter pour aller vers son émancipation"
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Nous n'avons pas pour autant négligé le combat politique en Savoie, bien au contraire. Dès 1997 nous avons compris que les caciques de la politique française en Savoie, qui envoyaient leurs amis historiens aboyer contre nous, s'accommodaient de notre présence tant que nous laissions libre le champ électoral. Et nous avons donc décidé tous ensemble (par un vote des adhérents) de présenter des candidats. Je ne reviens pas sur notre succès aux régionales de 1998, qui eut pour conséquence d'expulser de la Région Rhône-Alpes l'ambitieux Charles Millon. Nous avons acquis, par ce succès mais aussi et surtout par notre persévérance grâce à nos nombreux candidats, une stature de force incontournable dans les affaires publiques de la Savoie.
Ces campagnes électorales nous ont obligés à nous adresser au grand public, à l'immense masse des gens qui connaissent à peine l'existence de la Ligue savoisienne et qui raisonnent encore dans un système purement français. Nous avons donc dû sélectionner des objectifs, même modestes, qui peuvent être compris facilement. Cette démarche nous a conduits au gradualisme.
Qu'est-ce que le gradualisme? C'est accepter et encourager tout changement qui va dans le bon sens, qui rapproche la Savoie, même de manière infime, de son émancipation.
Dans cet esprit gradualiste, nous avons fait alliance avec le MRS (Mouvement Région Savoie) qui se limite officiellement à revendiquer la création d'une Région Savoie distincte de Rhône-Alpes. Au-delà du seul MRS, nous soutenons tous les régionalistes qui sont attachés aux particularismes de la Savoie, à son histoire, à sa langue populaire, le francoprovençal.
Nous avons aussi approuvé ceux qui portent un projet plus ambitieux, celui d'une région autonome à statut expérimental, une collectivité qui exercerait à la fois les compétences d'une région et se substituerait aux deux départements actuels. Ces gens, organisés dans l'association "La Région Savoie J'y Crois", présidée par Noël Communod, ne manquent pas une occasion de se démarquer de la Ligue savoisienne, qu'ils affectent de considérer comme extrémiste. Cette appréciation n'engage qu'eux-mêmes, mais nous persistons à approuver et à soutenir leur projet. Nous avons également félicité Messieurs Gaymard et Nycollin quand ils ont créé l'Assemblée des Pays de Savoie. Leur invention prouve objectivement que les habitants de la Savoie d'aujourd'hui ne se satisfont pas des institutions actuelles. Et si l'Assemblée des Pays de Savoie est prise de torpeur, nous n'y sommes pour rien.
Dans le même esprit gradualiste, nous avons pris, l'année dernière, deux engagements importants: par un vote au 9e. Congrès, nous avons approuvé le Projet de Constitution de l'Union Européenne, et nous avons désapprouvé l'admission de la candidature de la Turquie. Nous avons été fort bien inspirés de distinguer les deux sujets. Les électeurs gaulois les ont malheureusement amalgamés, ce qui les a conduits dans l'impasse où ils se trouvent à présent.
Donc, chaque fois que l'occasion se présente, la Ligue savoisienne indique au peuple de Savoie le chemin qu'il peut emprunter pour aller vers son émancipation.
Il reste tant à faire...
Nous n'avons pas hésité non plus à nous engager sur des sujets locaux, sectoriels, ponctuels. Dans de nombreux domaines nous avons pris position et nous avons participé à des actions, et nous en avons lancé nous-mêmes: environnement, transports, gestion des déchets, santé publique, hôpitaux, thermalisme, tourisme, culture, langue, patrimoine, etc. Mais notre action reste très faiblement perçue par l'opinion publique.
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"Le peuple de Savoie demeure profondément dépendant de la politique française et s'enfonce dans le pessimisme"
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Je ne voudrais pas, en ce dixième anniversaire, donner l'impression que tout va bien et que nous sommes satisfaits de l'œuvre accomplie et du cours des choses. Le peuple de Savoie demeure profondément dépendant de la politique française et s'enfonce dans le pessimisme, car il ne considère pas le projet savoisien comme une alternative crédible et ne s'engage pas pour le promouvoir. Nous manquons terriblement d'argent: aucune grosse fortune ne nous soutient, les généreux donateurs sont rares et les cotisations rentrent irrégulièrement. Or la visibilité, en politique, a un coût. Nous manquons aussi terriblement d'hommes et de femmes capables de représenter notre politique dans chacune des 600 communes de Savoie, dans chacune de ses milliers d'entreprises. Soyons reconnaissants envers celles et ceux qui organisent les deux temps forts de notre mouvement, la Fête nationale du 19 février et le Congrès à l'automne, qui participent à nos stages de formation, qui acceptent de prendre des responsabilités dans le fonctionnement de la Ligue savoisienne ou dans les Conseils municipaux.
La Ligue savoisienne ressemble à l'Union valdôtaine que défendait Émile Proment: elle ne tire ses forces que des forces individuelles que les Savoisiens mettent à sa disposition pour les multiplier. Elle ne peut rien sans la participation de chaque individu qui compose la nation savoisienne. C'est déjà un prodige qu'un mouvement comme le nôtre ait pu durer dix ans. C'est un prodige unique dans la longue histoire de notre nation. Il reste tant à faire, tant de défis à relever! Nous les relèverons ensemble, pour que vive la Savoie!
P.A.
 
 
 
La vie de Joseph de Maistre.
(Suite du récit tiré de la biographie de Joseph de Maistre par François Vermale, parue en 1927 dans les Mémoires et Documents de la Société Savoisienne d'Histoire et d'Archéologie.)
Résumé de l'épisode précédent:
Joseph de Maistre ne peut plus représenter officiellement le Roi de Sardaigne auprès du Tzar, qui a fait alliance avec Napoléon. Il reste pourtant à Saint-Petersbourg. Naturalisé russe en 1809, il devient même quelques mois ministre du Tzar, en 1811-1812, quand l'alliance franco-russe est rompue. Il l'exhorte à la guerre et au courage.
 
Livre VI: Le rêve religieux de J. de Maistre.
Chapitre I: L'union des Églises chrétiennes.
(...)
Ce rêve religieux de la "robe sans couture" fut celui de J. de Maistre. (...) Alors qu'il était à Chambéry substitut de l'avocat général fiscal, nous savons qu'il rêvait de faire, en dehors du sacerdoce, avancer le christianisme et rétablir l'unité chrétienne par la fusion des sectes dissidentes, en particulier du luthérianisme et du catholicisme. Jérusalem, et non Rome, devait être la capitale de cette Église universelle. Ce rapprochement devait être le but suprême de la Franc-Maçonnerie, son grand oeuvre.
Malgré les évènements de la Révolution française, J. de Maistre n'abandonna pas son rêve d'unité. Néanmoins, sous la poussée des circonstances, il se produisit, dans sa manière d'envisager le problème de l'Église universelle, un changement capital. Nous savons, en effet, que, pendant son séjour à Lausanne, J. de Maistre se livra, en la compagnie des prêtres réfractaires savoisiens, à de fortes études de théologie qui l'amenèrent à renoncer aux doctrines gallicanes et à adopter les doctrines ultramontaines. (...)
À partir de cette époque, J. de Maistre cessa d'être illuminé mystique pour être catholique ultramontain. (...)
En 1803, J. de Maistre arriva en Russie comme envoyé extraordinaire de son Roi. Face à l'Église orthodoxe, il reprit son rêve d'unité religieuse, mais tel qu'il le comprenait depuis son séjour à Lausanne. (...) À Saint-Petersbourg, J. de Maistre retrouva, en outre, les francs-maçons illuminés mystiques martinistes, les protestants et l'ordre des Jésuites.
***
J. de Maistre commença à jouer, dans la haute société de Saint-Petersbourg, un rôle considérable au point de vue religieux à partir de 1807.
À cette époque, dans la maison des Golovine, grands seigneurs russes, vivaient deux émigrés français: la princesse de Tarente, amie de Louis XVI et de Marie-Antoinette, et le chevalier d'Augard. Tous deux se faisaient remarquer par leur pratique des vertus chrétiennes.
Le chevalier d'Augard avait été nommé en 1796, par Catherine II, conseiller d'État et sous-directeur de la bibliothèque impériale. Depuis 1775, à la suite d'un prêche à Notre-Dame de Paris, d'Augard, qui était dans la marine royale, s'était adonné à la vie chrétienne et aux bonnes oeuvres. En Russie, il avait continué sa vie de chrétien exemplaire et il édifiait son entourage. C'était un véritable saint, et Mme Swetchine lui attribua "l'honneur d'avoir introduit le catholicisme en Russie". (...)
En octobre 1808, le chevalier d'Augard mourut. (...) Il mourut le 28 octobre. La veille, il avait donné audience à J. de Maistre et avait conversé avec lui. Le 31, J. de Maistre assistait à ses funérailles avec son fils Rodolphe.
Cette audience, accordée à J. de Maistre par le chevalier d'Augard mourant, a eu une importance capitale dans la vie de l'ancien sénateur de Chambéry. C'était à lui que le chevalier d'Augard avait remis les destinées du catholicisme en Russie. La preuve nous en est donnée par l'attitude de J. de Maistre après cette mort. Désormais, il se comportera comme le protecteur laïque du catholicisme russe et chaque matin, à partir de cette époque, il eut un entretien de deux heures avec un Jésuite. (...)
 
Chapitre II: J. de Maistre protecteur des catholiques russes (1809-1816).
Sous le protectorat de J. de Maistre, la défense catholique en Russie fut assurée avec vigueur. Nous avons vu ce qu'il fit pour empêcher l'établissement du monopole de l'enseignement et, par là-même, sauver les établissements d'instruction des Jésuites. Dans chacun des Mémoires que J. de Maistre adressa dans les années 1811 et 1812 au Tzar, il attaquait le protestantisme alors fort en vogue en Russie. Son argumentation contre la Réforme était celle déjà contenue dans son travail de 1797. À ses yeux, le protestantisme incarne toujours l'esprit de révolte contre les souverains; le catholicisme, au contraire, représente l'esprit de soumission à l'autorité royale. D'où sa conclusion: protéger le catholicisme, c'est protéger l'empire; favoriser le protestantisme, c'est préparer sa ruine.
À partir de 1809, le premier ministre Spéranski s'allia avec les protestants allemands, kantistes dévoués, tel le professeur Fessler, les francs-maçons rationalistes, les athées, les sceptiques, pour créer un mouvement d'opinion en faveur de ses projets de réformes politiques. Pour amener l'échec de Spéranski, nous avons vu déjà que J. de Maistre s'allia avec les illuminés martinistes et le parti vieux-russe. Il y eut un véritable complot contre Spéranski et ce ministre succomba. Le protestantisme, vaincu avec Spéranski, retrouva force et vigueur en 1812, avec le retour de la Russie à l'alliance avec l'Angleterre. La propagande du protestantisme allemand subit une éclipse. Ce fut celle des protestants anglais de la secte des Sociniens, c'est-à-dire des protestants qui niaient la divinité du Christ et sa préexistence, qui lui succéda. Ce protestantisme socinien déchaîna en Russie, à partir de 1812, une formidable offensive religieuse en constituant, avec l'argent britannique, une Société biblique russe sur le modèle de la Société biblique de Londres.
Malheureusement pour J. de Maistre, ses amis les illuminés martinistes protégèrent cette Société biblique et le prince Galitzine en devint un des patrons, au nom de la Tolérance, chère aux mystiques francs-maçons. J. de Maistre s'émut des progrès de la propagande de la Société biblique russe. Il voulut la gagner de vitesse. À cette offensive, il répondit en activant le prosélytisme catholique. Les circonstances devenaient particulièrement favorables. Un vent puissant d'ardeur religieuse passait sur la terre russe. Les âmes avaient besoin d'être consolées des deuils et des ruines causés par l'invasion française. La religion orthodoxe apparaissait insuffisante à beaucoup d'âmes slaves. Elles aspiraient aux consolations d'un culte moins exclusivement formel. La religion était autre chose qu'un chant, leur semblait-il!
***
Après 1809, surtout après 1812, des conversions plus nombreuses se produisirent sans qu'on puisse en dire exactement le nombre, soit dans la noblesse, soit parmi les marchands, soit dans le peuple. L'Église catholique de Petersbourg compta alors 10.000 fidèles. La méthode employée par J. de Maistre était la suivante: il agissait par persuasion auprès des grandes dames russes. Il discutait avec elles sur les résultats de leurs lectures. (...)
Cependant, les Jésuites comme les prêtres catholiques s'étaient engagés, vis-à-vis du gouvernement du Tzar, à ne pas exercer de prosélytisme parmi les sujets orthodoxes de l'Empereur. Le danger était donc certain, la propagande catholique pouvant provoquer, d'un moment à l'autre, les foudres administratives. Que fallait-il faire? Éternelle question que l'on posait à J. de Maistre et voici sa réponse: "Avant tout il importait d'agir avec mesure. Le devoir était d'éviter certains partis extrêmes, certaines actions hardies, c'est-à-dire des conversions publiques." (...)
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Malheureusement, il y eut des excès de zèle soit parmi les Jésuites, soit parmi les nouvelles converties. En octobre 1815, J. de Maistre écrivait de Petersbourg: "De grandes conversions ont frappé les yeux. Enfin, un grand nombre de personnes dans la haute classe ont passé à la religion catholique, du moins on le croit, et c'est assez pour exciter de l'autre côté un violent dépit." (...)
Le ministre des cultes, Alexandre Galitzine, illuminé mystique et un des amis et protecteurs de J. de Maistre, avait fermé les yeux tant que la propagande catholique avait semblé n'atteindre que les femmes, mais, lorsque le prosélytisme catholique fit des conquêtes parmi les hommes, Galitzine et son entourage commencèrent à s'alarmer. Un incident en l'année 1814 transforma ces alarmes en hostilité déclarée. Un neveu du comte Alexandre Galitzine était depuis trois ans élevé au pensionnat des nobles de Petersbourg, alors dirigé par les Jésuites. Ce jeune homme, âgé de 15 ans, se convertit au catholicisme. Dans son ardeur de néophyte, il refusa, aux fêtes de Noël 1814, de baiser le crucifix dans une cérémonie orthodoxe. Instruit de ces faits, Alexandre Galitzine retira aussitôt son neveu du pensionnat. Malgré toutes les remontrances, le jeune Galitzine persista dans son catholicisme. Ce fut un scandale. La princesse Tsoukerstanov écrivait, le 10 janvier 1815, sur cet incident: "Les Jésuites, je le prévois, se feront chasser un de ces jours". C'est ce qui allait se produire maintenant que J. de Maistre n'avait plus l'appui et la protection d'un des illuminés mystiques russes les plus notoires, le prince Alexandre Galitzine. Pris entre l'hostilité des protestants de la Société biblique, des matérialistes et rationalistes allemands d'une part, et l'hostilité du clergé orthodoxe d'autre part, le catholicisme romain, ayant perdu l'alliance des loges martinistes, devait s'effondrer. (...)
***
Rentrant en Russie après trois ans d'absence, Alexandre Ier, dont l'esprit était devenu de plus en plus bizarre et soupçonneux, était prévenu contre le catholicisme. (...)
Dès son retour à Saint-Petersbourg, le jeune Galitzine fut mandé par l'Empereur qui l'interrogea en personne. Ce jeune homme de 16 ans lui répondit "qu'il était le sujet dévoué de son maître jusqu'à la mort, mais qu'il demeurerait jusqu'au tombeau inébranlable dans sa foi". Quelques jours après, un ukase chassait les Jésuites de Saint-Petersbourg.
"Les Jésuites, écrivait J. de Maistre, trompés par le nombre et la qualité des conversions, ont cru avoir ce qu'on appelle ville gagnée; ils sont allés un peu trop vite; l'orgueil national s'en est mêlé, la catastrophe est arrivée." J. de Maistre en fut comme foudroyé. De plus, il ne sut pas dissimuler son dépit et commit des imprudences de langage. (...)
Le 6 février 1816, à midi, J. de Maistre eut une entrevue avec l'Empereur auquel il n'avait pas parlé depuis 1812. J. de Maistre constata, dès l'abord, qu'Alexandre Ier avait bien changé physiquement et moralement. Mentor eut peine à reconnaître Télémaque. Le vainqueur de Napoléon n'avait plus l'attitude modeste et démocratique d'avant Austerlitz. "L'Empereur s'avance avec ses 36 millions d'hommes dans ses poches, on le voit distinctement, il vous serre corps à corps, et même, comme il n'a pas l'ouïe fine, il approche sa tête de la vôtre. Son oeil interroge, le soupçon est assis sur son sourcil, et la puissance lui sort des pores." (...)
***
Dès l'apparition de l'ukase contre les Jésuites, J. de Maistre comprit qu'il ne pouvait plus rester en Russie. Il demanda à son Roi de le rappeler, ce qui eut lieu. Le 13 juin 1817, il prenait congé d'Alexandre Ier et des deux impératrices. Pour le ramener, le Tzar mit à sa disposition un vaisseau de la marine russe qui le déposa à Calais.
Ce départ de Russie frappait durement J. de Maistre dans ses intérêts familiaux. Son frère Xavier avait épousé une demoiselle d'honneur de l'Impératrice, il était général dans l'armée russe, et, par sa femme, jouissait d'une fortune fabuleuse. En tant que père, J. de Maistre avait espéré que, grâce à son prestige, à sa réputation qui était grande, grâce aux mérites de son fils Rodolphe qui était officier supérieur dans l'armée russe, il pourrait le marier richement dans ce pays où fortunes et gens n'étaient pas à la commune mesure. Il pensait aussi qu'il y établirait ses filles. C'est à ces rêves familiaux qu'il dût dire adieu. Il était devenu si bien russe, qu'il avait écrit à ses amis de Savoie, de Genève ou de Turin, qu'il pensait finir ses jours en Russie, qu'il n'avait aucun esprit de retour. L'ukase contre les Jésuites avait anéanti tous ses beaux projets!
Lorsque J. de Maistre quitta la Russie, son frère Xavier l'accompagna avec sa femme presque jusqu'au navire sur lequel il devait s'embarquer pour la France. Dans une lettre qu'il écrivait à son autre frère Nicolas, resté à Chambéry, Xavier dira sur ce départ: "Le chagrin de quitter un pays où il a été si bien traité l'avait abattu au point qu'il a vieilli de 10 ans dans ce dernier mois... En descendant la rivière (la Néva) il a dit: Adieu donc, beau Petersbourg! Nous n'avons presque pas parlé pendant la traversée."
(à suivre)
 
Un mot: seulement!
"Seulement": adverbe; sans rien ou personne de plus; uniquement (définition du Petit Larousse).
Dans le langage populaire savoisien, du Chablais à la Maurienne, cet adverbe est très usité. Il remplace, chez nous, d'autres adverbes: "donc", "simplement"... Cette utilisation abusive du "seulement" me fut quelquefois reprochée et pas uniquement par des profs.
Le promeneur solitaire, familier de la langue française, qu'il soit parisien, québécois ou lyonnais, frappant à la porte d'un chalet savoyard, entendra cette phrase classique: "Entrez seulement!"
Se retournant, il constatera qu'il est seul, personne ne le suit. Alors, pourquoi "seulement"?
Il aura droit également à tous les: "Asseyez-vous seulement! Faites seulement! Revenez seulement nous voir!" etc. etc.
De retour dans son pays, avec ses compatriotes parisiens ou lyonnais, il s'amusera de notre parler et de nos "seulement". Certains, plus sarcastiques, se moqueront peut-être des péquenauds savoyards.
Hé bien, oui! Notre français est différent du vôtre, j'en suis fier et je le revendique. Il fait partie de toutes ces petites différences qui, ajoutées les unes aux autres, nous distinguent des autres nations parlant la même langue.
Surtout, amis francophones, ne croyez pas que je cherche à me corriger de cet emploi, que vous jugez excessif, du "seulement". Au contraire, je mets un point d'honneur à parler comme mes ancêtres; je dirais même que j'en rajoute avec un certain plaisir; cela me rapproche de ma culture, de mes racines, j'en éprouve une véritable jouissance.
D'ailleurs, nous n'avons que faire de vos remarques; il est historiquement prouvé que nos aïeux maîtrisaient la langue française bien avant les sujets d'Henri IV ou Louis XIV.
"Seulement" est un élément de la barrière culturelle qui existe entre la Savoie et vous; il nous distingue; il nous sépare; il participe à cette frontière morale, spirituelle que vous n'effacerez jamais.
Français, si vous étiez au fait de notre histoire, vous seriez moins arrogants et vous baisseriez la tête à chaque "seulement" prononcé devant vous!
Oui, ce mot est entré dans l'Histoire de Savoie, par la grande porte: celle du dévouement, du sacrifice, de l'honneur, de l'amour de la Patrie. "Seulement" fut sublimé un jour de mai 1793. Rappelons-nous: Marguerite Frichelet, face au peloton d'exécution, regardant les tueurs républicains droit dans les yeux et disant:
"Maintenant, soldats, tirez seulement!
Guy Martin.
Note de la rédaction: les Suisses francophones émaillent leurs phrases de sonores "sans autre", équivalent exact de l'adverbe cher à Guy Martin.
 
 
 
C'est vous qui le dites...
"Que cousta lon che cousta, Viva l'Aousta!"
Cette formule, qui concluait le récit d'Evelyne et Pierre sur une visite au Val d'Aoste (page 5 du Savoisien de décembre, n°10) a été mal transcrite. Voici l'explication.
À l'époque, pas si lointaine, où le Val d'Aoste n'était plus qu'une province piémontaise, la langue courante (à côté du francoprovençal utilisé par les Valdôtains entre eux) était le piémontais: dans la Vallée, des personnes d'un certain âge le connaissent encore. On disait alors en piémontais: "Difende Osta, ch'a costa lòn ch'a costa!" (Défendre Aoste coûte que coûte, à n'importe quel prix). En langue piémontaise le "o" se prononce <ou>, et pour faire <o> il faut l'accentuer "ò".
Avec mes meilleurs vœux pour Le Savoisien et les Savoisiens!
Tersillo Fenocchio, Turin.
 
Savoie souveraine et laïque.
Les Savoisiens furent et sont toujours pour une Savoie souveraine démocratique et laïque. Pour autant, n'oublions pas nos racines, comme l’écrit le docteur Michel Fontaine dans le dernier Savoisien. Nos aïeuls étaient très majoritairement chrétiens. Qu'on le veuille ou non, nous sommes issus de cette civilisation et nous sommes fiers des valeurs humanitaires qui nous furent transmises. Vouloir aujourd'hui, en Savoie, sous prétexte de laïcisme, mettre sur un pied d'égalité l'islam et le christianisme, constitue une grave erreur de jugement et insulte nos anciens!
Qu'on en juge; dans le numéro 9 du Savoisien, notre ami Pierre Ottin Pecchio écrit (page 8): "En 9 mois dix articles du Savoisien ont été consacrés à des thèmes tournant autour des religions et des conflits dont elles sont le prétexte. Dix articles en 9 mois, c'est peut-être beaucoup pour Le Savoisien, mais ça n'est rien par rapport à ce dont les médias nous ont gavés pendant ce même temps. Rappelez-vous: la mort du pape, la nomination de son successeur, les J.M.J. et aussi les affrontements entre musulmans chiites et sunnites en Irak, entre Israéliens et Palestiniens à Gaza, la menace nucléaire venant de la République islamique d'Iran... Souvenez-vous des attentats du terrorisme islamique à Londres, à Charm El Cheikh, de la guerre au Cachemire et en Tchétchénie... Partout ou presque le feu, le sang, les hurlements, les vociférations, les imprécations! Partout les religions..." Plus loin: "De ce point de vue, n'est-il pas légitime de critiquer les religions plutôt que de tolérer passivement leur existence?"
Diable! (c’est le cas de le dire!) Quel amalgame!
Ainsi le décès de ce pauvre Jean-Paul II, homme de paix, de tolérance et d’amour s’il en fut, et la désignation de son successeur auraient donc été du feu, du sang, des hurlements, etc.? Ce texte laisse à penser que les fidèles des deux camps (musulmans et catholiques) sont coresponsables de ces désordres!
Les Savoisiens "catho" d’aujourd'hui ont-ils à ce point perdu les valeurs transmises par nos anciens pour qu'on les compare à des intégristes musulmans?
D’abord, si 10 articles du Savoisien furent consacrés aux religions, aucun ne traitait du christianisme; pas plus sur l'ancien Écho de Savoie. Ce n’est donc pas les "catho" qui monopolisent notre presse.
Avant l'annexion et jusqu'à la fin de la dernière guerre, le peuple de Savoie, chrétien catholique à 80%, vivait dans le respect de valeurs humanitaires; ces valeurs portées par le christianisme furent amplifiées, intensifiées par l’environnement montagnard et la rudesse du climat et de l’altitude; il fut hospitalier et secourable envers les voyageurs traversant les Alpes (voir les Hospices élevés dans les grands cols); courageux, travailleur et obstiné, il respectait les biens et les propriétés (chapelles garnies d'œuvres d'art ou chalets d'alpage restaient ouverts en permanence à tout le monde); pendant la guerre les Juifs, comme les Espagnols, trouvèrent un toit et du pain en Savoie.
N'est-ce pas le Savoisien Saint François de Sales qui écrivait: "L’homme est la perfection de l'univers, l'esprit est la perfection de l'homme, l'âme celle de l'esprit et la charité celle de l'âme"?
Au fur et à mesure que s'estompait la pratique religieuse chez nous, la criminalité et l'insécurité augmentaient. Aujourd'hui, les chapelles sont dépouillées de leurs modestes trésors et plus personne ne laisse un chalet ouvert!
Alors des questions se posent: l'athéisme a-t-il apporté l'égoïsme en chassant nos valeurs traditionnelles? Un siècle de laïcité officielle n'a-t-il pas nui au respect de la propriété d'autrui? Qui est "intoxiqué" au point de ne pas reconnaître le bien du mal? L'éducation des consciences à la raison n'était-elle pas mieux réalisée au siècle passé? Nous n'avons pas de réponses précises mais de sérieux soupçons et ne pouvons que constater un état de fait.
Aujourd'hui, ceux qui font parler d'eux dans les médias sont d'un côté les Ben Laden, Saddam Hussein et autres mollahs intégristes, de l’autre l'abbé Pierre (personnalité préférée des Français), mère Teresa, Jean-Paul II ou sœur Emmanuelle. Pour quelles raisons obscures veut-on les associer?
Ces derniers ont fait plus pour l'humanité que nombre de philosophes et l'auteur du "Traité d'athéologie"!
À choisir, je préfère la philosophie du Dalaï-Lama aux prêches d'un imam barbu qui envoie des enfants de 10 ans sanglés d'explosifs se faire sauter à la sortie des écoles! Pourtant, gardons-nous de généraliser; la Savoie accueillera toutes les religions respectueuses des droits de l'Homme (et de la femme!).
Arrêtons, s’il vous plaît, cette auto-flagellation permanente; assez de cette culpabilisation d'être héritiers d'une religion et des valeurs qu'elle apporta dans notre civilisation montagnarde. Nous sommes fiers de cet héritage et le revendiquons!
Pour l'instant, notre combat est ailleurs, il est pour une Savoie souveraine, démocratique et laïque; nous ne "désintoxiquerons" personne. Halte à l'uniformité fastidieuse, à la mondialisation soporifique et à la pensée unique décérébrée; laissons chacun libre de choisir sa fin de vie, sa philosophie ou sa religion!
Le comité (Ligue savoisienne) de Tarentaise.
Note du directeur de la rédaction:
Laissons chacun libre en effet! Tel est bien l'idéal qui rassemble les Savoisiens. Toutefois deux remarques:
1. La Ligue savoisienne n'emploie jamais les mots "laïque", "laïcité", car leur histoire est trop chargée en France. Le Projet de Constitution de la Fédération savoisienne se réfère à la prédominance du pouvoir civil: Article 6, "La Fédération savoisienne est fondée sur la prédominance du pouvoir civil. Elle ne reconnaît aucune religion d'État. Elle protège toutes les religions qui respectent et garantissent les droits et les devoirs de la personne humaine".
2. Pierre Ottin Pecchio rendait compte, avec des commentaires personnels, d'un livre du philosophe Michel Onfray. Son but n'était certainement pas de contraindre les lecteurs à adopter les convictions de Michel Onfray.
Le débat est largement possible dans les colonnes de notre mensuel. Toutefois, comme le rappelait Jean de Pingon lors du 10e. Congrès de la Ligue savoisienne, il s'agit essentiellement de réfléchir aux implications politiques et civiles des religions, et non d'en discuter les dogmes comme le ferait une revue de théologie ou de philosophie.
 
La Ligue savoisienne au quotidien.
Il n'y a pas vraiment de "trêve des confiseurs" à la Ligue savoisienne, tout juste quelques jours de fermeture du secrétariat. Et les Savoisiens expatriés en profitent pour débouler à l'improviste, comme notre ami "Le Ptiou d'Sbliossy" qui n'a pas écrit depuis mai 2005 dans nos colonnes mais songe à de nouveaux articles et travaille à la diffusion du francoprovençal. Plusieurs jeunes sont passés pour acheter des autocollants, des livres, des T-shirts: en repartant ils demandent un peu hésitants des bulletins d'adhésion. L'un d'eux croyait qu'il fallait être né en Savoie pour être accepté à la Ligue... Il y a encore des efforts à faire pour expliquer ce que nous sommes et ce que nous voulons!
Malgré les trous que Noël a faits dans les poches, les chèques arrivent, mais le retard est encore grand à combler. Les plus généreux sont les simples abonnés du Savoisien, qui joignent une lettre chaleureuse et se contentent rarement des 11 euros de l'abonnement standard: ils envoient 20, 25, 50 euros ou même davantage.
Des adhésions nouvelles arrivent, comme celle de cet assureur qui nous dit qu'il était sympathisant depuis une dizaine d'années. Il nous faut durer pour convaincre...
La Ligue n'a pas fait paraître dans Le Savoisien de décembre mon communiqué du 7 novembre relatif aux violences urbaines: après l'instauration de l'état d'urgence, il risquait de paraître décalé. Aujourd'hui plusieurs faits indiquent une persistance diffuse des agressions nihilistes envers les biens et les personnes, et ce communiqué peut encore servir. Le voici.
 
La République et le chaos.
Ici et là en Savoie, certains imitent l'exemple des violents désordres qui ont cours dans les villes de France. Les Savoisiens réprouvent vivement leurs actes, tout en constatant que cette République, une fois de plus, se livre à ses vieux démons: l'affrontement civil et la foire d'empoigne politique. La France s'enfonce dans la faillite financière, sociale et morale. Il n'y a pas de guérison en vue.
La Ligue savoisienne veut refonder la Savoie sur ses valeurs principales: l'amour du travail et le goût de la concorde. Libre à chacun de trouver ces valeurs ringardes, mais il n'y a pas d'autre voie.
J'appelle donc les habitants de la Savoie, de toutes origines et de toutes convictions, à se détourner des échecs français, et à s'inspirer des meilleurs exemples européens pour reconstruire une société qui permette le bien-être et la paix.
La France, c'est fichu, groupons-nous pour faire la Savoie libre!
7 novembre 2005.
Patrice Abeille,
Secrétaire général de la Ligue savoisienne.
 
 
Bloc-notes
Fête Nationale de la Savoie
Pour la onzième année consécutive, les Savoisiens et sympathisants se rassembleront pour partager un grand moment de convivialité.
Cette année, l'organisation de cette fête à été confiée à la province de Savoie Ducale.
Nous vous donnons rendez vous:
dimanche 19 février 2006 à Chambéry
salle des conventions, Z.I. de Bissy (dans l'enceinte du parc de la Foire de Savoie )
à partir de 11 heures.
Cette journée sera animée par l'orchestre VALÉRIE ET SES MUSICIENS
avec la participation du groupe patoisant LOS AGLIETONS.
Pensez dès à présent à retenir votre journée et à commander votre carte!
Tél: 08 70 42 44 55
04 79 31 44 55
04 79 62 21 95
04 79 69 44 91
Prix de la carte d'entrée et de participation au banquet: 25 euros
(moins de 12 ans: 15 euros).
 
Votre argent... à la poubelle!
Celui qui aurait l'idée de mettre chaque année entre 50 et 200 euros à la poubelle passerait pour un fou! C'est pourtant ce que vous faites en payant pour l'enlèvement et le traitement de vos déchets, et ce n'est qu'un début car vous produisez toujours plus de déchets qui coûtent de plus en plus cher à traiter. En plus, ça ne va pas s'arranger avec la hausse du prix du pétrole, bien au contraire!
Tout ça c'est de la faute des maires, car ce sont eux les responsables devant la loi de l'enlèvement et de l'élimination (sic) des déchets des ménages. Mais c'est bien vous qui élisez votre maire, non? Rendez-vous en 2008 pour les élections municipales!
 
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Une taxe inéquitable.
Depuis la loi du 15 juillet 1975 les communes sont dans l'obligation d'assurer l'élimination (sic) (1) des déchets des ménages. C'est aussi pour cela que la plupart des communes se sont regroupées, soit en Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI): Communautés de communes ou d'agglomération, soit en Syndicats intercommunaux.
Les communes ou leur groupement disposent de 3 modes de financement, au choix:
-a) la REOM, redevance des ordures ménagères, qui résulte du partage entre les usagers des frais de collecte et de traitement. Notons au passage que cette redevance basée sur le coût réel va disparaître en 2006 au profit de la taxe, bien qu'elle soit plus équitable. Elle permet en effet de proportionner le coût à la quantité de déchets produite par un ménage: c'est la redevance incitative qui favorise aussi le tri, permet le recyclage et limite d'autant l'incinération (2). Mais elle n'intéresse pas les maires: une dizaine de communes seulement ont fait ce choix en France.
-b) la TEOM, taxe des ordures ménagères, qui est un impôt direct calculé sur la base de la taxe foncière et qui s'ajoute à celle-ci. Ce n'est plus l'usager qui paye un service mais le contribuable qui paye un impôt. Qu'est-ce que ça change? D'abord, l'État se sert au passage (3), ensuite il n'y a aucune incitation à la limitation des déchets ni au tri, donc le coût de traitement est maximum et les bons citoyens (qui trient) paient pour les mauvais!
-c) le budget communal, alimenté par les impôts locaux, peut compléter la TEOM.
 
Une politique calamiteuse.
Jusqu'en 1990 les communes "éliminaient" les ordures dans des décharges ou les brûlaient sans trop de précautions. Résultat: pollution du sol, des eaux et de l'air. Depuis 1991 il faut traiter les fumées et contrôler les polluants (4). En 1992, enfin, une politique basée sur la réduction, le tri et la valorisation (recyclage ou récupération d'énergie). Malheureusement la loi du profit maximum fera dévier de ces objectifs; en 2005 il n'y a toujours pas de réduction des déchets, le tri et le recyclage sont très en dessous du souhaitable et seule l'incinération a progressé (en utilisant le faux nez de la valorisation énergétique) alors que c'est le moyen le plus polluant et le plus onéreux pour l'usager… mais le plus rentable pour les entreprises qui exploitent le filon. Nos maires dans tout ça? Les plus honnêtes ont été bernés, les autres ont été... complaisants!
 
Une facture très salée.
Quand le recyclage coûte en moyenne 35 € la tonne, l'incinération revient à 100 €, auxquels s'ajoute le coût de la collecte et du transport jusqu'à l'incinérateur. Pour la 2C2A (5) par exemple, le coût était en 2004 de 176 € /t dont 100 € pour l'incinération par le SIDEFAGE (6) à Bellegarde, plus 45 € pour la collecte, plus 31 € pour le transport en train d'Annemasse à Bellegarde (7). A cette facture déjà salée vont s'ajouter en 2005 l'augmentation des coûts de collecte et de transport liée au prix du carburant et celle de l'incinération elle-même qui devra répondre à des normes de pollution de plus en plus serrées.
Ne croyez pas que la production d'électricité ou de chaleur par certains incinérateurs va contenir les augmentations à venir: elle n'équivaut qu'à 10% environ du montant de l'incinération alors que le transport, collecte comprise, en représente les deux tiers!
Ne croyez pas non plus que les normes antipollution vont s'assouplir! C'est tout le contraire car on mesure de mieux en mieux les coûts indirects liés aux maladies environnementales causées par la pollution. Attendez-vous donc à une augmentation vertigineuse de vos impôts locaux tant que l'incinération restera le moyen privilégié (pourquoi? par qui?) pour le traitement de 80% de vos déchets.
 
Comment sortir de l'impasse?
Quand des choix erronés engagent l'avenir pour longtemps il n'est pas facile de faire marche arrière. Les EPCI, les SIVOM et autres SITOM, sont propriétaires encore pour longtemps des ruineuses machines à polluer que sont les incinérateurs. S'il est malheureusement impossible de les arrêter (que faire de millions de tonnes de déchets?) il faut chercher par tous les moyens à réduire leur activité et donc leurs nuisances. Cela suppose d'avoir du courage, de faire les efforts nécessaires pour sortir de cette impasse car le choix est simple: ou bien vous réduisez et vous triez vos déchets ou bien vous payez très cher votre négligence.
Réduire c'est possible pour un consommateur averti qui refuse de payer deux fois le prix des emballages: une première fois à l'achat du produit, une deuxième fois pour incinérer l'emballage. Trier c'est possible en utilisant les "Points verts" qui existent dans toutes les communes ou presque en attendant d'avoir chez soi les 2, 3 ou 4 poubelles qui permettront de trier efficacement et donc de recycler, alors que quand tous les déchets sont mélangés on ne peut plus que les incinérer.
Choisissez de ne plus mettre autant d'argent à la poubelle! Exigez de vos élus qu'ils vous facilitent la vie!
Pierre Ottin Pecchio,
Union Santé Contre Pollution.
 
1. On sait maintenant que le terme est impropre: on n'élimine pas un déchet, on ne peut que le transformer en un autre déchet qui ira dans une décharge sauf les rejets gazeux qui iront polluer l'air.
2. Le recyclage coûte moitié moins que l'incinération.
3. La gestion de la taxe par le Trésor public se traduit par un prélèvement de 8%.
4. Sauf les dioxines dont le contrôle n'est obligatoire que depuis 1997 pour un petit nombre d'usines d'incinération et ne sera applicable à toutes qu'à partir du 28 décembre 2005.
5. Communauté de Communes de l'Agglomération d'Annemasse
6. Syndicat mixte de gestion des déchets du Faucigny et du Genevois
7. D'après Le Messager du 21 juillet 2005, édition du Genevois.
 
 
 
 
Libérer sa voie? Libérer la Savoie? Libérer Sa Voie!
Commencer par se libérer soi-même pour pouvoir libérer son pays, c'est le sens du message que nous adresse Michel Fontaine dans son ouvrage Libérer Sa Voie (à paraître) dont Le Savoisien publie de larges extraits.
Michel Fontaine, né en 1947, Docteur en Médecine, vit à Chamonix où il exerce la médecine générale depuis une vingtaine d'années après avoir consacré plus de dix ans à la recherche médicale en immunologie.
C'est de sa réflexion de chercheur, de praticien au contact des malades et de Savoisien passionné de montagne qu'il tire le message fort qu'il nous adresse aujourd'hui.
Steve Jobs et Bill Gates, respectivement fondateurs d'Apple et de Microsoft, sont les exemples type de la réussite de la libre entreprise nord-américaine.
Il suffit de 100$ et d'une petite heure pour créer sa société aux États-Unis. Combien d'énergie, de temps perdus et d'argent bloqué en France pour cette même formalité et pour passer sous les fourches caudines de l'administration qui veut que la future entreprise lui soit soumise avant même qu'elle n'existe, qui veut qu'elle ait payé sa dîme avant même qu'elle n'ait gagné un premier sou? Il y est possible d'embaucher et de débaucher sans aucune formalité ni contrainte (l'employé débauché n'a pas besoin d'être assisté au niveau où cela se fait en France, il sait qu'il pourra retrouver très rapidement du travail) ayant ainsi toute la latitude et la flexibilité nécessaires pour courir les risques d'une aventure industrielle ou commerciale et éventuellement... de la réussir! De cette façon, le créateur d'entreprise dispose du maximum de chances et de libertés pour concrétiser son aventure. Passer de l'idée d'une entreprise à sa réalisation concrète demande un travail énorme, et encore plus de travail pour la rendre fructueuse. Toutes les énergies, toutes les ressources de l'entrepreneur doivent être mobilisées dans ce seul but et éviter de se disperser dans des activités improductives inutiles, notamment les activités administratives, stériles par essence.
Dans la Silicon Valley, la Mecque de l'informatique en Californie, la demande en personnel qualifié est telle que le chômage y est négatif: il y a plus d'emplois proposés qu'il n'y en a de pourvus. En France, s'il y a aussi des endroits où les emplois offerts sont en surnombre c'est pour une autre raison: ceux qui ne les pourvoient pas préfèrent tout simplement rester chômeurs, c'est moins fatigant et moins stressant.
La France a cherché à avoir les avantages du libéralisme économique sans les inconvénients ainsi que tous les avantages du socialisme-étatisme sans les inconvénients, ce qui était totalement impossible parce qu'antinomique. De fait, elle a les inconvénients des deux systèmes sans les avantages. Un pays ne peut être que l'un ou l'autre, ou libéral ou socialiste, pas les deux à la fois. Les mentalités qui régissent l'un ou l'autre système sont définitivement incompatibles.
Pour que le libéralisme fonctionne efficacement, une condition préalable doit être totalement remplie, celle du maximum de liberté. Sans cette condition, ça n'est même pas la peine d'essayer, car le libéralisme est avant tout une aventure menée par des individus libres d'entreprendre. Jamais Steve Jobs ni Bill Gates n'auraient pu réussir en France ce qu'ils ont entrepris aux États-Unis. Pour le comprendre il faut se rendre compte de la distance qui sépare ce type d'hommes et ceux qui régissent le système français, sous les fourches caudines desquels ils auraient dû passer! Tant qu'existera en France des rituels de soumission pour les innovateurs créateurs de richesses, tant qu'existeront en France des mentalités rétrécies auxquelles les mentalités ouvertes doivent se soumettre et rendre des comptes... ça n'est pas la peine de parler de libéralisme. Les hommes aux mentalités rétrécies imposent leur rétrécissement à la France. Peu importe ce qu'ils disent. Les faits parlent mieux qu'eux et la France, dans leurs mains, est devenue un pays tout "riquiqui", tout rétréci.
Bref, la France actuelle est à des années-lumière d'avoir la mentalité permettant de relever en vainqueur les défis de l'aventure moderne. Il lui faut la sécurité de l'emploi, des plans de carrière, des progressions à l'ancienneté, des hiérarchies archaïques et stériles, des incompétences protégées jusqu'à l'âge de la retraite, des vanités préservées de toute remise en cause, des paresses et des privilèges garantis en tant qu'avantages sociaux, les trente-cinq heures, la garantie des avantages acquis, les protections sociales maximales, la prise en charge maximale par l'État providence, etc., etc.
Où sont donc, dans cette société, la compétence, l'enthousiasme, la créativité, la vitalité, l'intelligence, la responsabilité, le goût du challenge et du risque, et les autres vertus individuelles qui prépareraient efficacement à demain? De fait la société française ne peut que stériliser ces qualités humaines qui dérangent ses routines, ses hiérarchies, qui l'obligeraient à se réveiller, à s'engager, à prendre des risques, à sortir de leur cocon les irresponsabilités statutaires. Les individus porteurs de cette dynamique de vie, qui représentent une espèce en voie de disparition sur le sol français, préfèrent chercher un environnement favorable à l'étranger, dans un des pays qui savent les honorer et valoriser leurs qualités. C'est la "fuite des cerveaux" qui sévit en France alors qu'elle en aurait le plus grand besoin pour renouveler son tissu industriel et économique, pour entreprendre la réforme de l'État qui lui éviterait de tomber... toujours plus bas.
 
Dr. Michel Fontaine.
 
 
La Savoie, fille aînée de l'Église.
Communication de Jean de Pingon au 10e. Congrès de la Ligue savoisienne.
En l'an 504 de notre ère il y avait, à l'emplacement de Carouge, une propriété royale. C'était le premier établissement des rois burgondes, les fabuleux Nibelungen, originaires de Scandinavie, qui avaient abandonné leur dernier royaume, le royaume de Worms dont les villes étincelaient au bord du Rhin, pour venir s'établir en Sabwald, en Savoie.
En l'an 502, le roi Gondebaud avait doté la Savoie d'une Constitution, dont le texte original est conservé à la bibliothèque du Vatican.
En l'an 504, ce roi assiste à une cérémonie qui a lieu dans la propriété royale de Carouge. Son fils aîné, Sigismond, est hissé sur un bouclier et acclamé par l'armée. La cérémonie du pavois signifiait que Sigismond devenait roi sans attendre de succéder à son père. Pour que Sigismond puisse régner sur Genève, qui devenait ainsi la capitale de son État, Gondebaud avait démembré son royaume, qui s'étendait du Rhin supérieur jusqu'à la Méditerranée et de la Loire jusqu'aux Alpes.
À la suite de ce démembrement, Sigismond régnait sur un pays qui représentait à peu près la Savoie historique et se nommait Sappaudia ou Sabwald.
L'année même où il accédait à la royauté, en 504, Sigismond se convertit au catholicisme. Il était déjà chrétien, disciple d'Arius, dont la doctrine était chrétienne mais réfutait le dogme trinitaire. Sigismond ne se fit donc pas baptiser, à la différence du mérovingien Clovis, ce roi des Francs qui, lui, était un véritable païen, adorateur de Diane aux neuf feux. À la différence du roi des Francs, Sigismond n'aura pas à se faire baptiser pour rejoindre l'Église catholique. L'évêque Avit, évêque de Vienne, se contenta de lui imposer les mains pour l'accueillir au sein de l'Église catholique et romaine.
Après cette cérémonie, Sigismond se rendit en pèlerinage à Rome. Il en revint avec de nombreuses reliques de saints. Il en offrit à sa cousine Clotilde qui avait épousé Clovis, le roi des Francs, et l'incitait à se convertir. Lorsque Sigismond voulut procéder à la dédicace de sa nouvelle cathédrale, à Genève, sous les vocables des saints Pierre et Paul, l'évêque Avit écrivit au pape pour obtenir des reliques de ces saints. Dans sa lettre, l'évêque rappelait au pape la récente conversion de Sigismond, en insistant sur le fait qu'il était le premier roi des Gaules à avoir embrassé "la vraie foi". Le pape accéda à la demande de l'évêque Avit. Peu de temps après, Clovis suivait l'exemple de Sigismond et cédait à Clotilde en recevant le baptême le jour de Noël de l'an 506. Pour montrer sa nouvelle dévotion, Clovis fit édifier à Paris, sur la montagne Sainte-Geneviève, une basilique à la dédicace des sains Pierre et Paul, à l'exemple du roi burgonde. C'est dans la crypte de cette basilique que Clovis sera inhumé.
Ainsi Sigismond, roi des Burgondes, souverain de Savoie, est-il confirmé dans la religion catholique en 504, tandis que Clovis, roi des Francs, est baptisé en 506.
Ainsi la Savoie est-elle la fille aînée de l'Église!
 
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Sigismond,
premier roi européen soumis à l'Église de Rome,
fonda dans son royaume le monastère
de Saint-Maurice d'Agaune en Valais.
Il fut lui-même canonisé.
 
 
 
L'histoire de France falsifiée.
Pourtant, tous les livres d'histoire de France l'affirment: grâce à la conversion de Clovis, c'est la France qui est devenue "la fille aînée de l'Église".
Grégoire de Tours, évêque et historien gallo-romain du sixième siècle, auteur de l'Historia Francorum, que l'on peut considérer comme le premier historien français, a monté une véritable supercherie pour faire de la France la "fille aînée de l'Église". Il inaugure ainsi ce qui deviendra une tradition pour bon nombre d'historiens français: la falsification historique.
L'affaire a déjà été dénoncée par plusieurs historiens: l'historien belge André van de Vyver, l'historien et abbé français Maurice Chaume et, plus récemment, l'historien suisse Justin Favrod. Les découvertes de ces historiens n'ont eu que peu d'écho, et la falsification de Grégoire de Tours, reprise par ses continuateurs, relève toujours de la version officielle pour ce qui est de l'histoire de France.
Ce que ces historiens ont mis en évidence, c'est le procédé de Grégoire de Tours, qui a falsifié quelques évènements historiques afin d'antidater de dix années la conversion de Clovis. Mais à ce jour, aucun historien ne s'est véritablement interrogé sur la cause de ce que Justin Favrod appelle "la manipulation historique de Grégoire de Tours".
Que Clovis se soit fait baptiser à Reims, avec plusieurs milliers de ses guerriers, le jour de Noël de l'an 496, ainsi que l'affirme Grégoire de Tours, ou qu'il ait reçu le baptême en l'an 506, après avoir vaincu les Alamans lors de la bataille de Tolbiac, ainsi que le démontrent les historiens précités, quelle importance? Pourquoi cette manipulation historique, et que changent dix années pour un tel évènement?
Je ne vais pas développer ici les arguments des historiens qui ont démonté la supercherie de Grégoire de Tours, leur démonstration est sans appel, ceux qui voudront s'en convaincre se reporteront à l'excellent ouvrage de Justin Favrod.
Ainsi, à deux années près, c'est donc bien la Savoie qui est "fille aînée de l'Église"!
Voilà pourquoi Grégoire de Tours a monté cette étrange manipulation historique: les Francs devaient être les premiers, et la conversion de Clovis ne devait rien devoir à un roi burgonde de Savoie! Ainsi Grégoire de Tours écrivit-il que Clovis avait enlevé Clotilde; cela est faux: c'est le roi Gondebaud qui lui avait donné sa nièce pour épouse.
Non seulement la Savoie est la fille aînée de l'Église, mais c'est à elle que la France doit son baptême. Voilà une histoire qui devrait donner à réfléchir. Quinze siècles ne suffisent pas pour faire d'un mensonge une vérité!
J. de P.
 
"Rhone-Alps-Savoy"
"Rhone-Alps—Savoy" et, au-dessous, "Rodano-Alpi—Savoia": ainsi est libellé le titre sur l'un des deux frontispices d’une "carte régionale" en dépliant (ISBN 3-259-01374-1) que vient de publier Kümmerly+Frey, le célèbre institut cartographique suisse (www.swisstravelcenter.com). Le frontispice est orné d'un tableau d'assemblage des 16 cartes de la série représentant le territoire métropolitain français; le n° 1 n'a pas été attribué à l'Île-de-France, comme l'on pourrait s'y attendre, mais à la Bretagne, et le n° 16 à la Corse. "Rhone-Alps—Savoy" porte le n° 14. L'autre frontispice est intitulé "Rhône-Alpes" et, au-dessous, mais en lettres tout aussi grosses, "Savoyen—Savoie". Autrement dit, l'éditeur met sur le même plan la région Rhône-Alpes et la nation historique de Savoie, sans tenir compte de l'incorporation officielle de cette dernière à Rhône-Alpes. Pour les Suisses, la Savoie existe; un Genevois passant la frontière toute proche ne dit pas qu'il va dans le Rhône-Alpes, sauf s'il veut faire trempette dans ledit fleuve, ni même en Haute-Savoie, mais en Savoie, et celle-ci commence pour lui à Saint-Julien. Le second frontispice reproduit un fragment savoisien de la carte, avec les villes d’Aix et de Chambéry et le lac du Bourget. La carte, à l’échelle 1:180.000, inclut un index des localités, indiquant entre parenthèses le numéro du département correspondant, ainsi que six plans de ville synoptiques: Chambéry, Grenoble, Lyon-Villeurbanne, Roanne, Saint-Étienne et Valence. La légende est en six langues, soit, dans l’ordre, anglais, français, allemand, néerlandais, espagnol et italien; il ne s'y trouve aucune faute, pour autant que j'en puisse juger. La carte est agréable à consulter, les couleurs ne sont pas criardes et les caractères d’imprimerie sont bien lisibles, même pour celles et ceux dont la vue est affaiblie par l'âge. Elle mentionne les curiosités touristiques, châteaux, cathédrales, églises, ruines, etc. Si donc vous passez par une librairie ou une papeterie suisse, demandez la carte régionale Kümmerly+Frey 1374; vous ne regretterez pas cette petite emplette, ne serait-ce que pour l'offrir à quelqu'un qui aime la Savoie.
Guiu Sobiela-Caanitz, Ardez (Suisse)
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 Sauvetage au Petit Saint-Bernard.
Quand les États compliquent tout, la solution efficace passe par l'Europe. Petite histoire prémonitoire du rapprochement de la Savoie et de la Vallée d'Aoste?
Endommagé depuis la dernière guerre, l'hospice du Petit Saint-Bernard tombait en ruine. L'Ordre des Saints Maurice et Lazare, propriétaire des bâtiments (qui se trouvent en territoire français) n'ayant pas les moyens de le restaurer, a dû mettre en vente. Une opération de sauvetage de ce patrimoine historique a donc été lancée depuis plusieurs années par le Conseil général de Savoie et la Région autonome Vallée d'Aoste, qui se sont portés conjointement acquéreurs. Cette opération aurait dû se faire dans le cadre de l'Accord de Rome (1993) qui régit les coopérations transfrontalières entre communautés territoriales. Mais elle devenait alors d'une complexité inextricable! C'est par la création d'un Groupe Européen d'Intérêt Économique, régi par le droit communautaire, que le sauvetage sera possible!
source: "Le Peuple valdôtain" n°47, 15 décembre 2005.
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Un stand des Savoisiens devant l'Hospice
lors d'une Fête des Bergers.